For­mi­da­ble nou­velle : une par­o­die de jus­tice en Turquie a décidé de met­tre en lib­erté quelques “otages”, pour quelques jours, en attente d’un nou­veau “juge­ment” le 2 jan­vi­er. Non, le ton n’est pas ironique, c’est bien une victoire…

C’est une vic­toire si on mesure le rap­port des forces. Une vic­toire sur l’ab­surde, une vic­toire con­tre la machine à con­damn­er qu’est dev­enue l’in­jus­tice en Turquie, privée des mag­is­trats qui refuseraient d’être aux ordres, et désor­mais dotée de lois “anti-ter­ror­istes” pour con­damn­er sur mesure tout opposantE au régime.
Alors, obtenir des libéra­tions à la marge, arracher quelques otages de la prison, vider ces trous à rats, c’est dans ces con­di­tions là, une victoire.

Et comme il est réjouis­sant de voir d’un coup fleurir des arti­cles de presse, même sous des appel­la­tions, des titres que nous “igno­ri­ons” jusqu’i­ci, tant ils avaient été dis­crets sur la Turquie et le Moyen-Ori­ent depuis des années, sauf pour som­br­er dans des “ori­en­tal­ismes” convenus.

Il est aus­si amu­sant de devoir répon­dre à des “rédac­tions” qui avant le procès ne don­naient pas cher pour un pronos­tic de libéra­tion pos­si­ble, et refusèrent de financer le voy­age de jour­nal­istes, pour­tant prêtEs à accom­pa­g­n­er les délé­ga­tions d’au­teurEs vers Istan­bul. Encore une occa­sion de voir de près le fonc­tion­nement de la machine des médias mainstream.
Les mêmes hier, voulaient à tout prix savoir si Aslı avait été réelle­ment arrêtée “alors qu’elle arro­sait ses fleurs”, (remar­quez bien le soucis sex­iste du détail… Impor­tant… le détail qui fait tout l’ar­ti­cle…). Fort heureuse­ment d’autres ont fait davan­tage que de la broderie autour de dépêch­es, et ne sont pas allés à Istan­bul pour le “scoop”, ou la couleur des rideaux de justice…

Mais savoir que c’est au préal­able un réveil de con­sciences, hors de ces tam­bours médi­a­tiques qui se crèveront à la pre­mière diver­sion, qui a entraîné les regards vers l’u­nivers car­céral de la Turquie, est ras­sur­ant. Aslı n’est plus seule, Aslı n’est plus la seule… à point­er la bête…

Dif­fi­cile de savoir si le régime n’a fait lui aus­si qu’une diver­sion, en remet­tant en lib­erté pro­vi­soire des otages dont le nom s’é­tait mur­muré, écrit, crié, mon­tré sur des vidéos, partagé sur les réseaux dits soci­aux. Oui, il faut le rap­pel­er, et cela sur dif­férents con­ti­nents… Dif­fi­cile même de devoir penser au 2 janvier.

Alors, puisque le son du tam­bour résonne, que cette presse qui n’avait par­fois pas daigné pub­li­er les let­tres d’ap­pel d’Aslı décou­vre que son nom peut faire ven­dre du papi­er, c’est le moment de déchir­er le rideau de fumée, de bat­tre nous aus­si tam­bour, et faire sor­tir d’autres noms, d’autres vis­ages, d’autres Aslı… jusqu’à les faire sor­tir des geôles, eux et elles aus­si.

Puisque la “pen­sée” est attaquée, empêchée, que la créa­tion est men­acée, muselée, et que sans elle toute résis­tance devient impos­si­ble, mobilisons-là !

Des écrivains, nov­el­listes, poètes, cinéastes, musi­ciens, uni­ver­si­taires, chercheurEs, intel­lectuels, qui déjà se sont lev­és, décou­vrent peu à peu l’é­ten­due des crimes com­mis, l’é­ten­due des purges, des empris­on­nements, et le mur con­stru­it autour de l’Eu­rope, qui à la fois a fait se noy­er la migra­tion, et dis­simule le paysage dévasté du Moyen-Orient.

Et ces pris­es de con­science n’ont créé qu’une lézarde pour­tant… Dus­sions nous l’élargir avec les ongles, il ne se peut que cha­cunE retourne à ses inhi­bi­tions et sa part de néant, à sa marchan­di­s­a­tion de consommateur.

Et si nous en sommes réduits à men­er ces escar­mouch­es avec ces fas­cismes qui ger­ment, avec ceux éclos, c’est aus­si parce que, cha­cun avec ses dra­peaux, ses marottes, ses “poli­tique­ment cor­rects”, nous sommes engoncés dans ce cos­tume étroit des sou­verain­ismes nationaux cen­sés nous “pro­téger” de la perte de nos “valeurs”, somme toute totale­ment marchandes.

Une ren­gaine de télé noir et blanc dis­ait “le poète aaa dit laa vééérité, il doit être exé­cutééé”. Belle ren­gaine pour cour d’injustice.

Mais j’ai plus ringard encore sans doute pour notre beau siè­cle… Les pro­pos d’un gars qui n’avait rien com­pris paraît-il au “post mod­ernisme”, à l’é­panouisse­ment indi­vidu­el, à la valeur tra­vail et à l’ob­jec­tiv­ité jour­nal­is­tique oblig­a­toire… Un gars qui se mêlait des “affaires” des autres. Il y a 60 ans déjà, ce gars-là nous dis­ait de ne rien laiss­er tomber, “sous les huées des enfants prodiges”…

C’est aus­si lui qui a signé la péti­tion pour Aslı et ses compagn(on)es… cherchez bien, tout en haut, à la let­tre A.

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Daniel Fleury
REDACTION | Auteur
Let­tres mod­ernes à l’Université de Tours. Gros mots poli­tiques… Coups d’oeil politiques…