La pre­mière audi­ence du procès à l’en­con­tre d’Aslı Erdoğan aura lieu le 29 décembre.

Les pièces du dossier d’Aslı Erdoğan ont été exam­inées indi­vidu­elle­ment par 18 juristes (avo­cats, juristes, académi­ciens) bien con­nus en Turquie, ayant des opin­ions poli­tiques dif­férentes. Ces 18 autorités morales ont tous con­venu qu’il n’y avait aucun élé­ment de qual­i­fi­ca­tion de “crime” dans ses arti­cles, con­for­mé­ment au sys­tème juridique turc actuel. Il en va de même pour le cas de Naciye Alpay. Seuls cinq de ces 18 exa­m­ens juridiques, qui sont rel­a­tive­ment courts, ont pu aujour­d’hui encore, être traduits vers l’anglais.

Kedis­tan vous en livre une tra­duc­tion française en en choi­sis­sant deux par­mi eux. Vous retrou­verez le reste des doc­u­ments en anglais ICI.

Vous pou­vez trou­ver tous les arti­cles con­cer­nant Aslı, dans ce dossier spécial. 

Aslı Erdoğan’s case doc­u­ments had been indi­vid­u­al­ly reviewed by 18 crim­i­nal lawyers (judge, lawyer, aca­d­e­mi­cian) well-known in Turkey. These 18 legal per­sons who have polit­i­cal stances total­ly dif­fer­ent from one anoth­er, have agreed that there is no ele­ment of a crime in these arti­cles in accor­dance with the cur­rent Turk­ish legal sys­tem. This is the same for Necmiye Alpay’s case as well.

Only five of these 18 legal reviews, which are rel­a­tive­ly short­er, could have been trans­lat­ed, here. (This file will be updated)


Eren Keskin

Avocate, vice-présidente de l’Association turque des droits de l’homme (İHD), fondatrice du projet “Aide juridique pour les femmes qui ont été violées ou autrement victimes de sévices sexuels par les forces de sécurité nationale”.

La con­damna­tion d’Aslı Erdoğan pour avoir con­trevenu à l’ar­ti­cle 302 est déraisonnable et illégale”

1 — Aslı Erdoğan, arrêtée dans le cadre d’une opéra­tion poli­cière con­cer­nant le jour­nal Özgür Gün­dem, a été inculpée en ver­tu de l’ar­ti­cle 302 du Code pénal turc et reste détenue.

En ver­tu de l’ar­ti­cle 302, toute per­son­ne qui porte atteinte à l’in­tégrité du pays en autorisant une autre entité à gou­vern­er une par­tie ou la total­ité du ter­ri­toire, ou enfreint l’u­nité nationale, ou man­i­feste le con­sen­te­ment à la sépa­ra­tion de cer­taines par­ties du ter­ri­toire se trou­vant sous la sou­veraineté et l’ad­min­is­tra­tion de l’E­tat, et exé­cute des actes visant à affaib­lir l’indépen­dance de l’E­tat, est punie d’une peine de per­pé­tu­ité incompressible.

Cet arti­cle est générale­ment appliqué aux chefs d’or­gan­i­sa­tions et aux mem­bres d’or­gan­i­sa­tions armées. Charg­er Aslı Erdoğan avec cet arti­cle est déraisonnable.

Selon les précé­dents de la Cour européenne des droits de l’homme, le fait de charg­er quelqu’un de l’ar­ti­cle en ques­tion néces­site plus que des soupçons raisonnables; Il faut des preuves con­crètes. Abstrac­tion faite de la ques­tion des preuves con­crètes, il n’y a même pas de soupçons raisonnables pour con­damn­er Aslı Erdoğan au titre de l’ar­ti­cle 302.

Le proces­sus juridique dépend de l’ex­is­tence de preuves tan­gi­bles. Lorsqu’on con­sid­ère la vie et les œuvres d’Aslı Erdoğan, il est évi­dent qu’elle ne peut faire par­tie d’au­cune organ­i­sa­tion ayant une struc­ture hiérar­chique stricte. Dans la sit­u­a­tion actuelle, il n’y a même pas de soupçon d’im­pli­ca­tion, encore moins de preuves con­crètes. Par con­séquent, la con­damna­tion d’Aslı Erdoğan pour avoir con­trevenu à l’ar­ti­cle 302 est déraisonnable et illégale.

2-) L’ar­ti­cle 100 du Code de procé­dure pénale turc définit les con­di­tions de déten­tion suivantes :

A- S’il existe des faits qui ten­dent à démon­tr­er l’ex­is­tence d’une pré­somp­tion crim­inelle et d’un “motif d’ar­resta­tion” exis­tant, un man­dat d’ar­rêt con­tre le sus­pect ou l’ac­cusé peut être ren­du. Il n’y aura pas de man­dat d’ar­rêt si l’ar­resta­tion n’est pas pro­por­tion­née à l’im­por­tance de l’af­faire, à la peine prévue, ou à la mesure de sécurité.

B- (2) Aux cas sus­men­tion­nés, un “motif d’ar­resta­tion” peut être con­sid­éré comme existant :

A) Si le sus­pect ou l’ac­cusé a fui, échap­pé ou s’il existe des faits spé­ci­fiques qui jus­ti­fient une pré­somp­tion de fuite possible.

B) Si la con­duite du sus­pect ou de l’ac­cusé tend à démon­tr­er l’ex­is­tence d’un fort soupçon qu’il va tenter ;
1. Détru­ire, dis­simuler ou fal­si­fi­er les preuves,
2. Met­tre une pres­sion illé­gale sur les témoins, les vic­times ou d’autres personnes.

Tout d’abord, Aslı Erdoğan n’a aucune respon­s­abil­ité légale sur le jour­nal. Rien ne jus­ti­fie le soupçon qu’elle va fuir, et elle n’a pas le pou­voir de dis­simuler ou fal­si­fi­er les preuves.

Des mesures plus légères auraient pu être appliquées dans son cas. La déci­sion de délivr­er un man­dat d’ar­rêt ne peut en aucun cas être légale­ment justifiée.

Par exem­ple, l’an­ci­enne rédac­trice en chef du jour­nal Eren Keskin est égale­ment pour­suiv­ie en ver­tu du même arti­cle que Aslı Erdoğan dans la même affaire. Elle a été inter­dite de voy­age à l’é­tranger et doit respecter d’autres con­di­tions judi­ci­aires. Même si cela con­stitue égale­ment une atteinte à ses droits, on espère qu’au moins Aslı Erdoğan pour­rait égale­ment être libérée dans des con­di­tions similaires.

3- Les écrits d’Aslı Erdoğan et les livres trou­vés dans sa mai­son ne peu­vent être con­sid­érés comme une preuve d’un crime d’au­cune façon, surtout quand on con­sid­ère qu’un de ses arti­cles, pub­lié dans un autre mag­a­zine [autre que Özgür Gün­dem, jour­nal incrim­iné] qui n’a fait l’ob­jet d’au­cune enquête à ce jour, est illé­gale­ment présen­té comme preuve.

La République turque est sig­nataire de la Con­ven­tion européenne des droits de l’homme. L’ar­ti­cle 10 de la présente Con­ven­tion pro­tège le droit à la lib­erté d’expression.


Ayşe Batumlu

Avocate

La déci­sion illé­gale de détenir Aslı Erdoğan, sans fonde­ment juridique, est util­isé comme un out­il pour la punir d’avoir des opin­ions opposées.”

1- À mon avis, il est tout à fait clair, même à un pro­fane sans for­ma­tion juridique, qu’il n’y a pas de fonde­ment juridique pour détenir Aslı Erdoğan.
Le crime dont elle est accusée se rap­porte à l’ar­ti­cle 302 du Code pénal turc 5237, notam­ment “violant l’u­nité nationale et cau­sant le partage du pays”. On peut se deman­der si cette loi est bonne ou mau­vaise, ou si elle est néces­saire, compte tenu en par­ti­c­uli­er de ses impli­ca­tions pour la lib­erté d’ex­pres­sion, mais cela est une tout autre chose.

Si, toute­fois, nous accep­tons que la loi dans sa forme actuelle soit néces­saire, nous sommes tou­jours con­fron­tés à la ques­tion: «Quelles valeurs juridiques l’ar­ti­cle 302 défend-il?» À mon avis, l’in­ten­tion de cet arti­cle est de pro­téger les droits des indi­vidus à Vivre et par­ticiper à une société démoc­ra­tique. Mal­heureuse­ment, dans la pra­tique, cette valeur a été remise en ques­tion et le droit des indi­vidus à par­ticiper à la démoc­ra­tie est men­acé en Turquie. Cet arti­cle est main­tenant util­isé comme une excuse pour intimider le peu­ple turc.

C’est exacte­ment ce qui est arrivé à l’écrivain et penseur mon­di­ale­ment célèbre Aslı Erdoğan. Il n’y a aucune pos­si­bil­ité que Aslı Erdoğan ait com­mis ce crime. Le crime de vio­l­er l’u­nité nationale et de provo­quer la par­ti­tion du pays est une ques­tion d’ac­tu­al­ité, et c’est pourquoi il s’ag­it d’un crime con­sé­cu­tif. Il ne peut être com­mis que par des actes vio­lents, de sorte qu’il ne peut être com­mis exacte­ment comme il est défi­ni par la loi. On ne peut pas com­met­tre ce crime par une action de nég­li­gence, c’est impos­si­ble. Le crime en ques­tion est lié au ter­ri­toire de l’E­tat, à l’indépen­dance de l’E­tat et à l’u­nité de l’E­tat. Ce crime ne peut être com­mis par des men­aces, mais que par l’usage de la vio­lence. L’aspect moral du crime se pro­duit dans le cas où l’a­gresseur agit avec inten­tion, tel que défi­ni par l’article.

Par con­séquent, il est impos­si­ble de com­met­tre ce crime par écrit, et il faut avoir de mau­vais­es inten­tions pour pré­ten­dre qu’Aslı Erdoğan a eu une telle préméditation.

Pour l’ac­cu­sa­tion d’être «mem­bre d’une organ­i­sa­tion ter­ror­iste», je voudrais tout d’abord soulign­er que je ne suis pas d’ac­cord avec le lég­is­la­teur sur le terme de «ter­ror­isme». Je voudrais égale­ment soulign­er que les mil­i­tants des droits de l’homme n’u­tilisent pas ce terme.

Si, cepen­dant, je réponds à votre ques­tion selon la loi pénale turque (TCK), la loi antiter­ror­iste (TMK) et les déci­sions de la Cour suprême, c’est-à-dire selon le code de droit actuel, ma réponse serait :

Pour com­met­tre ce crime tel que défi­ni par TMK et TCK, il doit y avoir con­ti­nu­ité, un parte­nar­i­at réguli­er et plan­i­fié, une ges­tion et une struc­ture hiérar­chique et des faits mon­trant que l’ac­cusé est un mem­bre de cette struc­ture. Des cir­con­stances telles que les activ­ités, la plan­i­fi­ca­tion, la répar­ti­tion des tâch­es et la réu­nion pour un nom­bre indéter­miné d’ac­tiv­ités crim­inelles, la sol­i­dar­ité entre les mem­bres et la dis­ci­pline doivent égale­ment être établies. Plus impor­tant encore, le mem­bre de cette organ­i­sa­tion qui com­met le crime organ­isé doit savoir et doit être prêt à com­met­tre ce crime. C’est l’aspect moral du crime !

Mais évidem­ment, rien de tout cela n’est arrivé. Nous sommes con­fron­tés à la réal­ité d’un écrivain puni juste parce qu’elle exprime des vues que le gou­verne­ment et cer­tains autres groupes «n’ai­ment pas» et juste parce qu’elle proteste et se sent per­tur­bé par le bain de sang et le cli­mat de haine dans lequel le pays se trouve !
Mal­heureuse­ment, toute per­son­ne qui n’est pas d’ac­cord avec la struc­ture poli­tique au pou­voir et l’idéolo­gie offi­cielle, et qui se com­porte de façon respon­s­able en s’ex­p­ri­mant courageuse­ment est con­fron­tée à cette accusation.

En bref, Aslı Erdoğan fait face à des accu­sa­tions illé­gales en rai­son de ses points de vue opposés et la déci­sion illé­gale de la détenir sans fonde­ment juridique, est util­isé comme un out­il pour la punir d’avoir ces opinions.

2 — La déten­tion pro­vi­soire est une mesure de pro­tec­tion très forte. Il ne devrait être appliqué que s’il n’ex­iste aucune autre solu­tion pour pro­téger les intérêts indi­vidu­els ou publics. Il y a eu deux appels pour Aslı Erdoğan, mais les deux ont été rejetés. Quelle est la légalité ?

La déten­tion est une mesure de pro­tec­tion. La procé­dure habituelle est le procès sans déten­tion. La déten­tion pro­vi­soire devrait être appliquée dans des cir­con­stances excep­tion­nelles, car elle est très restric­tive. Il restreint indi­recte­ment la lib­erté indi­vidu­elle et tous les aspects de sa vie. Cepen­dant, cette mesure qui exige de fortes raisons pour être applic­a­ble, est util­isée par l’estab­lish­ment poli­tique pour punir l’op­po­si­tion pour les raisons que j’ai men­tion­nées ci-dessus. L’ap­pareil gou­verne­men­tal, c’est-à-dire les autorités judi­ci­aires, est devenu l’in­stru­ment de cette puni­tion. Selon l’ar­ti­cle 90 de la Con­sti­tu­tion turque, les règles de la CEDH sont équiv­a­lentes et ont même préséance sur le droit turc en cas de con­tra­dic­tion. Non seule­ment les règles de la CEDH ont des critères très stricts pour la déten­tion comme mesure de pro­tec­tion, mais notre pro­pre Con­sti­tu­tion, même avec ses insuff­i­sances, et nos règles de procé­dure pénale, ont égale­ment des critères stricte­ment sem­blables. Cela est le résul­tat des efforts de cer­tains pro­fes­sion­nels du droit respec­tés et des groupes d’op­po­si­tion qui ont livré une longue bataille en por­tant leurs dossiers devant les tri­bunaux européens des droits de l’homme. (Ici, je dois men­tion­ner son nom et ren­dre hom­mage à Tahir Elçi qui a déployé de grands efforts sur cette question.)

Mais mal­heureuse­ment, le prob­lème per­sis­tant de l’ingérence du gou­verne­ment dans les insti­tu­tions en Turquie mon­tre que des arrange­ments juridiques rel­a­tive­ment libéraux ne suff­isent pas à établir un sys­tème juridique libre et démocratique.

Légale­ment, seule l’ex­is­tence de faits qui mon­trent une forte sus­pi­cion d’un crime ayant été com­mis et une bonne rai­son de déten­tion peut entraîn­er la déci­sion de détenir l’ac­cusé. Si l’im­por­tance du crime n’est pas pro­por­tion­nelle à la peine prévue ou aux prob­lèmes de sécu­rité, la déci­sion de détenir n’est pas prise.

Dans le cas d’Aslı Erdoğan, cepen­dant, elle est accusée d’un crime très grave, mais nous ne voyons aucune preuve «forte» démon­trant que ce crime a été com­mis. Quelle est la preuve qu’elle est mem­bre d’une organ­i­sa­tion et qu’elle est dans une activ­ité qui sat­is­fait aux critères que j’ai men­tion­nés ci-dessus ? Est-ce que devenir dis­si­dent est suff­isant pour porter ces accu­sa­tions? Bien sûr que non. Encore une fois, il n’y a aucune preuve non plus qu’elle ait com­mis le crime de prop­a­ga­tion de pro­pa­gande pour une telle organ­i­sa­tion. De plus, avec les change­ments juridiques apportés par le 4ème Paquet Judi­ci­aire infâme, la pro­pa­gande est con­sid­érée crime si elle inclut la force et la violence !

L’ar­ti­cle 7 de la loi antiter­ror­iste (TMK) définit très claire­ment une per­son­ne comme ayant com­mis un crime de pro­pa­gande s’il légitime des élé­ments de force, de vio­lence et de men­ace ou encour­age les gens à appli­quer ces méth­odes. Con­sid­érant que la peine min­i­male pour un crime de pro­pa­gande est de 1 an, en fait, met­tons de côté qu’une déci­sion de déten­tion ne peut pas être faite avec cette accu­sa­tion, il n’y a même aucune preuve que Aslı Erdoğan ait com­mis ce crime ! Le con­tenu de ses écrits ne s’in­scrit nulle­ment dans ce domaine.

En résumé, je dois répéter ce que j’ai dit au début. Aslı Erdoğan est punie sans juge­ment en rai­son de ses vues opposées aux pou­voirs qui exis­tent et pour soulign­er les con­tri­bu­tions de l’E­tat à l’escalade de la vio­lence et des con­flits internes dans notre pays. De plus, toutes les com­posantes de la société qui pour­raient réa­gir néga­tive­ment aux actions du gou­verne­ment doivent être intimidées.

3‑Tous ces écrits sont aus­si dans les lim­ites de la cri­tique et dans le cadre de la lib­erté de pen­sée. Même dans les lois exis­tantes et à notre avis anti­dé­moc­ra­tiques de l’E­tat de Turquie, ces écrits ne sont pas con­sid­érés comme des crimes, mais au con­traire l’écri­t­ure et leur dif­fu­sion sont pro­tégés. De plus, tous ces écrits, tou­jours con­tre la vio­lence, trou­blés par la lourde vio­lence éprou­vée et écrite avec un désir d’une société pais­i­ble, témoignent de la grande ago­nie que vivent les Kur­des. Et l’É­tat ne veut pas qu’ils soient écrits. Même l’É­tat ou les indi­vidus sont con­tre l’idée exprimée par ces écrits, même ils sont trou­blés et choquant par eux, son droit d’ex­primer ses idées doit être pro­tégé en par­ti­c­uli­er par l’Etat !

Je voudrais dire que, je partage toutes ses opin­ions qu’elle a exprimées dans ses écrits. Étant un lecteur fidèle de ses écrits, j’adore sa façon d’ex­primer ses idées. Mais même si tel n’é­tait pas le cas, si nous voulons un sys­tème juridique égal­i­taire et démoc­ra­tique avec l’é­tat de droit et non un sys­tème seule­ment pour cer­taines per­son­nes et cer­taines idées, nous devons évidem­ment défendre son droit de les exprimer. En fait, nous sommes con­fron­tés à un autre prob­lème à ce stade : la men­ace d’iné­gal­ité de traite­ment pour quiconque pense comme Aslı Erdoğan, qui lit ses écrits, partage ses valeurs, en atten­dant de lire plus d’elle ! Un Etat ne peut pas divis­er ses citoyens de cette manière. Les États ont à la fois des devoirs act­ifs et pas­sifs et une respon­s­abil­ité de pro­téger les droits de leurs citoyens et de lever tous les obsta­cles qui empêchent les per­son­nes d’ex­ercer leurs droits.

4 — Les livres et les mag­a­zines trou­vés et con­fisqués lors de la perqui­si­tion poli­cière d’Özgür Gün­dem, jour­nal dont Aslı Erdoğan ne vis­i­tait les bureaux que de temps en temps, ser­vent-ils de preuves con­tre elle?

Tout d’abord, cette incur­sion dans une insti­tu­tion médi­a­tique est illé­gale et oppres­sive. Il n’y a pas de fonde­ment juridique pour ce raid et il vise à fer­mer les voix des adver­saires. Ozgur Gun­dem est l’une des pre­mières et plus anci­ennes vic­times des opéra­tions du gou­verne­ment pour fer­mer les voix de la dis­si­dence. Cette opéra­tion est effec­tive­ment con­traire au droit des per­son­nes et à la lib­erté d’in­for­ma­tion. En out­re, j’ai tou­jours été hor­ri­fié par le terme «con­fisqué» qui soulig­nent que les livres et les jour­naux pour­raient être la preuve d’un crime. Cela mon­tre l’opin­ion défor­mée de l’É­tat sur les activ­ités liées à la pen­sée. Livres, mag­a­zines et en réal­ité, les pen­sées sont perçues comme des armes. En fait, ne pas penser comme eux est con­sid­éré comme un crime con­tre l’É­tat et le gou­verne­ment ! C’est cer­taine­ment une car­ac­téris­tique d’un mécan­isme d’É­tat oppres­sif et despotique.

Quant à votre ques­tion, sup­posons que les livres et mag­a­zines «con­fisqués» soient des «preuves du crime». Bien sûr, les gens qui écrivent, vis­i­tent occa­sion­nelle­ment ou sou­ti­en­nent le jour­nal ne sont pas et ne peu­vent pas être traités comme respon­s­ables pour eux. Tout d’abord, les crimes et les puni­tions sont pour les indi­vidus. Mais je tiens à soulign­er que les livres et les mag­a­zines ne sont jamais la preuve d’un crime dans les démoc­ra­ties réelles. Aslı Erdoğan écrit courageuse­ment sur des ques­tions qui brû­lent quiconque ose les touch­er, les ques­tions sur la ques­tion kurde, pour laque­lle le gou­verne­ment a ban­ni tout dis­cours en dehors du sien, les ques­tions de civils assas­s­inés, les ques­tions des meur­tri­ers qui ne sont pas tenus respon­s­ables par l’É­tat. Elle s’oc­cupe des réal­ités, de ses sen­ti­ments, de ses obser­va­tions comme un écrivain authen­tique et non lim­ité aux lignes rouges établies. Elle est un chercheure de vérité que le gou­verne­ment n’aime pas.

Tout cela doit ren­dre les dieux en colère! Comme elle l’a égale­ment dit très bien, “Ce qui est en cours d’ex­er­ci­ce est exacte­ment la lit­téra­ture elle-même !” Même ce qui est puni …

Mais d’i­ci quelques années, le nom qui sera rap­pelé avec beau­coup de respect et d’ad­mi­ra­tion sera celui d’Aslı Erdoğan.


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