Des “accidents” comme ça, en Turquie, on les appelle “des crimes de travail” ou des “assassinats au travail”.
A Şirvan, commune de Siirt, dans une mine de cuivre à ciel ouvert se trouvant dans le village de Maden, un glissement de terre, suivi d’un effondrement a couté la vie à 4 mineurs et en a emprisonné près d’une quinzaine sous la terre. Cétait le 17 novembre dernier. [4 morts et 14 disparus officiels selon les sources]
Des ouvriers présents sur les lieux ont filmé le glissement de terrain.
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Cinq responsables ont été mis en garde-à-vue, dont le responsable de la sécurité, l’ingénieur chef de la zone, le propriétaire de l’entreprise sous-traitant. Ils ont été libérés par le tribunal. Seul le directeur de l’établissement, Mehmet Oğuz a été arrêté.
Un accident similaire était survenu le 10 février 2011 dans une mine à ciel ouvert de charbon près d’Elbistan. Comme celle de Silvan, cette mine appartient au holding Ciner, proche de la galaxie affairiste de l’AKP.
Dans les deux cas, les responsables de chantier n’avaient tenu aucun compte des risques induits par la géologie, des couches sédimentaires de fort pendage (déclivité) favorisant les glissements de terrain.
Le directeur Mehmet Oğuz a déclaré devant le parquet, qu’il s’agissait d’une “catastrophe naturelle, imprévisible et inévitable”.
“En ce qui concerne la sécurité du travail dans la zone, il n’existe aucune précaution que nous aurions du prendre et que nous n’avons pas pris. L’incident est, comme j’ai affirmé, une catastrophe de nature naturelle, imprévisible et inévitable. Il n’est pas question dans cette région, d’une quelconque travail d’excavations.”
Pourtant, les témoignages des ouvriers sont de nature à contredire le responsable. En effet, le 22 juillet dernier, un premier éboulement annonciateur avait eu lieu. Le mineur Vedat C. explique :
“Au printemps, des failles sont apparues dans la mine. Les failles étaient tellement larges que, même des machines de travail pouvaient entrer à l’intérieur. Dans la mine il n’y avait pas de technique de gradins. Et pour cette raison, la terre glissait sans arrêt. Si c’était arrivé dans la journée, ce serait une catastrophe.”
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“Je suis l’oncle de Mahmut Batumak. Il travaille ici depuis trois mois. Il a commencé tout récemment.
Il y avait déjà une faille là haut. Ils [les ouvriers] avaient dit il y a dix jours qu’il y avait une faille là-bas. Alors ils [les dirigeants] avaient fermé la faille, pour que la terre ne viennent pas sur la mine. Et pour que l’information ne fuite pas. Mais voilà, c’est arrivé.… Et depuis trois jours il n’y a pas de travaux [de sauvetage]. Je suis venu hier, d’Istanbul.… Il y avait juste une pelleteuse qui marchait là haut… [en larmes], le directeur du Monsieur le Gouverneur est arrivé, et nous nous sommes disputés avec lui.… Pourquoi, il n’y a qu’une seule une pelleteuse qui marche ici ? Pourquoi ils ne laissent pas couler la terre vers le bas, et essayent de la dégager avec une pelleteuse ? C’est pour ne pas fermer la mine. Mais ils ne peuvent pas dégager cette terre même en un mois… Il y a la mine en bas… C’est la vie qui est importante, ou la mine ?”
Visiblement les travaux avancaient vraiment lentement…
[*Désolés… La vidéo que nous avions ajoutéé ici est supprimée par le journal qui l’avait publiée.]
Le Ministre d’énergie et ressources naturelles, et le gendre d’Erdogan en personne, Berat Albayrak, sont venus sur place.
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“Cela fait deux jours que nous supplions… Pour que la mine ne soit pas salie, même pas une poignée de terre ne se laisse glisser vers le bas. Ils vont tout dégager avec des camions… Pour l’amour de Dieu, publiez, pour que tout le monde le sache. Si on laisse glisser cette terre, en une journée nos proches vont être dégagés. Publiez, s’il vous plait. Leur vie, n’ont-elle pas plus de valeur que la mine ?”
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“Ministre, Ministre ! Tu m’entends Ministre. La Terre est grande. Tu tiens tête au monde. Tu devrais t’occuper des problèmes de ton Etat. Regardes, tu vois les gradins ? Ils ne sont pas loins. Même pas à deux mètres. Un mètre, un mètre ! Mettez votre main sur votre conscience [coeur]. Tu te mets mettez derrière le peuple, pendant le coup d’état du 15 juillet. Mais, là„ vous avez mis plein de soldats autour de vous. Vous vous refiliez derrière les soldats. Ce soldat est mon frère. Je suis venu à minuit, et tu as mis ce soldat en face de moi. Pourquoi il est là ce soldat dans ce froid ? Ce gens ont-ils jeté une pierre à ce soldat ? Ont-il endommagé ce chantier ? Que font les soldats ici . Là-bas, le boulot se terminera en travaillant. Que votre foyer s’écroule, que votre foyer s’écroule… Il ne peut pas avoir de ministère comme ça ? Tu t’es réfugié derrière moi le 15 juillet, ne ne réfugie pas derrière mon frère soldat maintenant. Ecoute ce que le citoyen te dit. Où est votre conscience ? Allez les dégager… [au militaire] Toi aussi tu es des miens. Tu es des miens.……”
Pendant l’état d’urgence, les purges, les grands discours contre le terrorisme et l’unité de la Nation, il est des mineurs, dont le travail est le seul univers quotidien, qui continuent à mourir pour le profit de “ceux du Palais”, et à qui on demande en plus de trouver cela “naturel”, alors que rien n’est fait justement pour éviter les effondrements prévisibles dans cette configuration industrielle.
Les travaux de déblaiement se poursuivraient aujourd’hui encore…