Lev­ent Pişkin est avo­cat et mil­i­tant act­if, défenseur des droits humains et LGBTI. Il est l’av­o­cat de l’as­so­ci­a­tion LGBT Kaos­GL, de la “Semaine des fiertés d’Is­tan­bul” dont il est mem­bre du comité d’organisation.

Il est égale­ment mem­bre de l’as­so­ci­a­tion ÖHD (Juristes libres) qui fait par­tie des 370 organ­i­sa­tions de société civile fer­mées par le Min­istère d’in­térieur, le 11 novem­bre 2016. L’av­o­cat est aus­si, l’un des respon­s­ables exé­cu­tifs du HDP à Istan­bul. Lev­ent avait défendu ses col­lègues Ramazan Demir et Ayşe Acınık­lı arrêtéEs en mars 2016 et libéréEs en sep­tem­bre.

Lev­ent a été arrêté dans la mat­inée du 14 novem­bre après avoir ren­du vis­ite, avec d’autres col­lègues, à Sela­hat­tin Demir­taş, Coprési­dent et député du HDP, arrêté le 4 novem­bre et empris­on­né depuis à Edirne, dans les con­di­tions que l’on sait (dans le même bloc que des mem­bres de Daech, pour bien lui sig­ni­fi­er une accu­sa­tion de “ter­ror­isme”).

Lev­ent Pişkin, lui, était actuelle­ment détenu à Bur­sa. Il est passé aujour­d’hui mer­cere­di 16 novem­bre, devant le par­quet, qui n’a pas demandé la pro­lon­ga­tion de sa déten­tion. Il devrait donc être remis en lib­erté pour com­para­ître libre lors d’un prochain juge­ment con­cer­nant les accu­sa­tions dont il fait tou­jours l’objet.

L’ÖHD a annon­cé la déci­sion du par­quet sur Twitter.

Après sa vis­ite récente à Demir­taş, Lev­ent avait été pris comme cible par les médias au ser­vice du régime Erdoğan. Les médias  Sabah, Takvim, Ulusal Kanal et bien d’autres on annon­cé que Lev­ent Pişkin, avait vis­ité Demir­taş afin de “trans­met­tre à un mag­a­zine alle­mand, une note man­u­scrite du député, et des infor­ma­tions des­tinées à la propagande.”

Les asso­ci­a­tions dont Lev­ent est mem­bre avaient dénon­cé immé­di­ate­ment son arrestation.

ÖHD et “Semaine des fiertés d’Is­tan­bul” soulig­nent qu’il s’ag­it d’une attaque à la rela­tion de l’av­o­cat et son client et un exem­ple des poli­tiques d’iso­la­tion par empris­on­nement et pré­cisent “Le fait que les entre­tiens d’un avo­cat avec son client, se reflè­tent dans les médias dans le pays ou à l’é­tranger, n’est en aucun cas un crime.” De fait, l’ou­ver­ture de l’en­quête con­cer­nant Lev­ent Pişkin et sa mise en garde-à-vue sont des pra­tiques totale­ment illé­gales et con­tin­u­ent une vio­la­tion des droits d’avoir une défense et un juge­ment équitables.

L’Observatoire inter­na­tion­al des avo­cats en dan­ger” (OIAD) avait pub­lié aujour­d’hui à son tour, un com­mu­niqué, invi­tant les autorités turques “à se con­former aux con­ven­tions inter­na­tionales aux­quelles la Turquie est par­tie et à remet­tre en lib­erté Lev­ent Pişkin.” Il appel­lait à une mobil­i­sa­tion inter­na­tionale immé­di­ate en soutien.

Par ailleurs, Jacques Bouys­sou, avo­cat au bar­reau de Paris et mem­bre du Con­seil de l’Or­dre, a annon­cé via Twit­ter que Lev­ent Pişkin était désor­mais “mem­bre d’hon­neur” du Bar­reau de Paris.

En sou­tien nous pub­lions ici, une inter­view de Lev­ent Piskin paru dans “Le Bul­letin” n°11 le 27 juin, 2016 du Bar­reau de Paris que vous trou­verez ICI

Inteview de Levent Pişkin, Avocat au Barreau d’Istanbul, avocat de Ramazan Demir et Ayşe Acınıklı.
Jacques Bouyssou : Quel regard portez-vous sur la justice de votre pays?
Levent Pişkin : Je ne pense pas qu’il y ait un quelconque mécanisme de justice en Turquie. Tout le monde sait que l’exécutif tient entre ses mains le pouvoir judiciaire, lequel ne fait qu’exécuter des décisions déjà prises. Les lois sont discriminatoires. Le pouvoir n’a pas pour objectif d’assurer la liberté ou la justice pour les citoyens turcs. Si tu ajoutes à tout cela le conservatisme particulier des magistrats, ça aboutit à une justice répressive.
JB : Pourtant la Turquie est signataire de la CEDH et il y a des juges suffisamment indépendants pour avoir remis nos confrères en liberté
LP : Ils ne font qu’appliquer la loi. La Turquie est membre de la CEDH mais c’est le pays le plus condamné par la Cour. D’une manière générale, les décisions sont privées de toute conception de justice. Il y a une aggravation de la situation: nous n’avons jamais vraiment eu un État de droit mais c’est de pire en pire. Le problème de ce pays est que les lois ont toujours été faites pour protéger l’état et pas les citoyens. On arrive avec un régime de parti unique qui régit tout dans le pays.
JB : Quelles sont les causes pour lesquelles vous vous engagez ?
LP : Premièrement les droits de l’homme. Je défends aussi la communauté LGBTI, ainsi que les Kurdes, car ce sont les premières victimes
J’aime défendre toutes les causes délaissées… mais il y en a tant. J’ai par exemple défendu les participants à la Transpride la semaine dernière. La manifestation était interdite et 11 personnes ont été interpellées. Je les ai toutes défendues et j’ai obtenu leur liberté.
JB : Ces engagements vous exposent-ils à des menaces particulières ?
LP : Oui. Il y a quelques jours, une petite bombe a explosé dans mon jardin. Ce devait être l’œuvre de nationalistes turcs car il y avait un ballon avec le drapeau turc dedans. Une fois, un membre des forces spéciales m’a annoncé qu’il s’occupait de moi et qu’on se reverrait. La première action d’Erdogan élu président a été de porter plainte contre moi car je l’ai traité de PD, ce qui pour moi n’est pas une insulte mais une qualité. J’ai été condamné deux fois pour cela. Tout le monde me connaît depuis cette affaire, ce qui m’expose à des menaces. Ça ne me paraît pas extraordinaire car nous sommes nombreux à subir ce type de menaces. Ma mère en arrive à souhaiter que je sois en prison pour être protégé.
JB : Qu’attendez-vous de vos confrères français ?
LP : Solidarité et écoute. Continuez à vous tenir à nos côtés et à nous soutenir. Merci pour la mobilisation et la solidarité du barreau de Paris. Notre barreau est tellement absent qu’on ne sait pas ce qu’on peut demander à un barreau…
Cet entretien a été réalisé le 22 juin à Istanbul pendant l’attente du délibéré. A l’issue d’une journée de débats, la demande de liberté de nos confrères a été rejetée malgré les réquisitions du parquet qui avait demandé la liberté sous contrôle judiciaire. Ce n’était qu’une manœuvre pour démobiliser la défense, illustrant ainsi tristement le constat de Levent Pişkin.

Une cer­taine mobil­i­sa­tion a donc été fructueuse. Mais des accu­sa­tions qui sont refor­mulées pèsent tou­jours à son encontre.

Des sou­tiens ont plu sur les réseaux avec le hash­tag  : Lev­ent Pişkin n’est pas seul.

Derya Pişkin : Lev­ent Pişkin n’est pas seul, parce que le super-héros ne sont jamais seuls !


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