Özgür Gündem, journal opposant turco-kurde est fermé, ses journalistes ont été molestés et arrêtés. Le moment de la perquisition a été enregistré et retransmis par la chaine de télé IMC, elle aussi opposante et régulièrement cible de répression. Les journalistes de la chaîne ont également été arrêtés à leur tour, et leur matériel confisqué.
La vidéo témoigne des arrestations. L’image se fige, et on continue à entendre la journaliste en contact téléphonique. « Nos cameras sont en train d’être confisquées, en ce moment… nos caméras sont confisquées ! » dit-elle, « Nous sommes dans les locaux d’Özgür Gündem, avec ses journalistes… Nooon, nooon, je suis de la chaîne IMC !….. » ensuite on entend des cris, et l’appel est coupé. Cela se passe devant les téléspectateurs, en direct.
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23 journalistes ont été arrêtés par les forces spéciales. Günay Aksoy, Reyhan Hacıoğlu, Ender Öndeş, Doğan Güzel, Ersin Çaksu, Kemal Bozkurt, Sinan Balık, Önder Elaldı, Davut Uçar, Zana Kaya, Fırat Yeşilçınar, journaliste de l’agence DIHA Mesut Karnak, Gülfem Karataş d’IMC qui s’exprimait à la télé et son caméraman Gökhan Çetin sont celles et ceux qui sont identifiés pour le moment.
Parallèlement des perquisitions ont été effectuées, au domicile de l’Avocate Eren Keskin, en son absence, et à la maison de Filiz Koçali, toutes les deux anciennes rédactrices en chef d’Özgür Gündem.
L’avocat d’Özgür Gündem, Özcan Kılınç a déclaré que les locaux ont été totalement saccagés et précise que les journalistes ont été insultés, molestés, menottés au dos, traînés sur le sol. « J’ai été présent lors de plusieurs perquisitions, même dans les années 90. Mais celle-ci n’était plus une perquisition mais un saccage. » ajoute-t-il. “Par exemple une fois les disques durs des ordinateurs retirés, les policiers renversaient les ordinateurs, ils ont mis les affaires personnelles de nos camarades en sac, toutes les notes d’infos et les livres, ont été mis dans des sacs en jute. Ils ont même arraché des murs les anciens numéros du journal et les ont emportés.”
Autour de 18h, les membres de l’IHD (Association des droits humains) ont fait une déclaration devant les locaux de l’association et ont demandé la libération immédiate des journalistes. Malgré les blocages de la police, les manifestants rassemblés devant l’IHD, ont scandé des slogans comme « La presse libre ne peut pas être muselée », « le droit d’informer ne peut pas être empêché ».
Özgür Gündem est dans le collimateur du pouvoir depuis longtemps. Ses journalistes sont régulièrement inquiétés. La majorité de ses numéros parus ont fait l’objet de procès…
Kedistan publiait le 20 juin l’arrestation de 3 des 44 bénévoles qui avaient endossé la fonction de “rédacteur/trice” à tour de rôle. Accusés de propagande pour organisation terroriste, ils avaient été emprisonnés. Erol Önderoğlu, journaliste, représentant Turquie de Reporters Sans Frontières et reporter à Bianet (il est l’un des invités du festival de cinéma de Douarnenez, en France, en août prochain, consacré aux Peuples de Turquie), et Prof. Dr. Şebnem Korur Fincancı, auteur et médecin légiste, qui a notamment enquêté après les massacres de Cizre… en faisaient partie.
Une campagne de soutien aux journalistes est en cours :
Le journalisme n’est pas un crime
#ÖzgürGündemSusturulamaz
(Özgür Gündem ne peut pas être muselé)
On voit combien l’état d’urgence signifie état total de non droit en Turquie. Ceux qui l’ont accepté, au nom de l’union nationale, sont désormais des complices de ces exactions contre les organes de contre-pouvoirs, quelles que soient leurs molles protestations.
Pour ne pas avoir voulu comprendre que les premières purges, mêmes massives, s’accompagneraient immédiatement d’autres, plus larges et visant la totalité de l’opposition, les dirigeants du CHP portent une lourde responsabilité désormais. Ils ont contribué à faire éclater l’opposition à Erdogan, et à livrer les secteurs les plus combattifs à une répression sauvage et sans contrôle judiciaire réel, vu l’état d’urgence. Les destructions et perquisitions dans les locaux du HDP, désormais parti politique dans la ligne de mire de tout le monde, participent de ce deuxième cercle des “purges”…
Il y a vraiment urgence à réagir !
Özgür Gündem :
Site | Facebook | Twitter @ozgurgundemweb1
Sedat Yılmaz, réalisateur, avait fait un long métrage sur Özgür Gündem, “Press”, qui sera présenté au festival de Douarnenez à partir du 20 août.