De nombreux artistes et célébrités avaient participé au meeting pour “la démocratie et les martyrs” qui s’est déroulé à Istanbul, Yenikapı le 7 août. Sıla, chanteuse de pop turque avait annoncé qu’elle ne serait pas parmi les participants : « Je suis absolument contre le coup d’Etat, mais je ne souhaite pas figurer dans un tel show. »
Dans une période où on voit régulièrement des célébrités sur les tribunes des meetings organisés par l’AKP, exprimant leur soutien, tressant des louanges à Erdogan et à sa démocrature, cette annonce sincère et « osée », dans l’ambiance visqueuse où « l’union nationale » fait recette, a provoqué de fortes réactions. Sur les réseaux sociaux Sıla a reçu des messages de soutien, mais elle a été condamnée par les pro-régime. Le lynchage médiatique a rapidement dépassé les réseaux sociaux, traversé les médias alliés au régime, allant jusqu’à l’annulation de tous les concerts programmés de la chanteuse.
Sıla n’a pas reculé et elle s’est expliquée en disant “Il est question de démocratie, et j’ai donné démocratiquement mon avis. Quoi qu’il en soit j’assume mes propos.”
La démocratie ?
En réponse, les Mairies AKP, ont déclaré l’une après l’autre, par biais de communiqués de presse, l’annulation des concerts de Sıla. Le concert d’Istanbul du 21 et 22 septembre annulé par la Mairie de grand métropole d’Istanbul : « La posture honorable montrée par notre nation, et les artistes conscients du concept de Nation, a trouvé la place qu’elle mérite. » Le communique précise que certain(e)s artistes ne font pas le devoir dont ils sont responsables et continue : « Il existe des artistes qui qualifie de show, la lutte que notre nation mène sur des places afin de réapproprier notre pays, et qui se moquent de cette volonté et de cette posture honorable. Les concerts prévus les 22 et 23 septembre de Sıla Gençoğlu qui est une de ces artistes, sont annulés. »
Les concerts de Bursa, et de Kayseri ont également été annulés.
Pendant que certains assurent leur carrière en émettant des louanges, voire reçoivent une scène, un rôle par-ci, une émission télé par-là, Sıla est grillée. Il y a des “places” à prendre… Elle est belle cette “démocrature”…
Sıla ne faisait pas partie de la playlist préférée de Kedistan. Mais quand des propos tout à fait normaux pénalisent une artiste, un soutien s’impose, même si cette artiste ne court pas le même danger que des journalistes comme Zehra Dogan ou Şermin Soydan jetées en prison.
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Sıla est née à Denizli en 1980. Elle a étudié la musique à l’Université de Bilgi à Izmir. Pendant de longues années elle a été la choriste du chanteur Kenan Doğulu. Depuis 2007 elle chante en solo et obtenu plusieurs prix de la musique. Elle a 6 albums à son actif, qui ont tous porté l’artiste dès leur sortie, à la tête des hit.
La chanson de la vidéo ci-dessus est extraite de son 5ème album « Yeni ay » (Nouvelle lune) du 2014.
Vous pouvez écouter son dernier album ici : http://spoti.fi/20Xeez
Sıla : Site Internet | Youtube | Facebook | Twitter
dernière minute :
A Kedistan, on est pas très foot non plus… Mais apprendre qu’une star de ce sport, Hakan Sükür, a fait l’objet d’un mandat d’arrêt “Gülen”, fait réfléchir. Cette ex-star du foot avait d’abord intégré l’AKP, le parti présidentiel, pour en ressortir pour désaccord, en 2013. Il avait fui le pays après une procédure pénale pour «insulte» contre le président turc. Il s’était installé il y a quelques mois en Californie. Rappelons qu’il y avait déjà eu des purges dans le milieu du football début août quand une centaine d’arbitres et de responsables avaient été licenciés. Toujours l’effet Gülen.
La purge en cours depuis près d’un mois a touché toutes les institutions et secteurs de la société turque : armée, éducation, justice, presse, milieux des affaires et sportifs. Environ 16.000 personnes ont été inculpées et incarcérées. Quelque 6.000 autres suspects sont toujours en garde à vue prolongées sous état d’urgence. 130 000 personnes ont été “suspendues”…
Erdogan ne s’arrêtera pas en si bon chemin, maintenant qu’il a fait taire le 2e parti du Parlement, désormais aux ordres lui-aussi, le CHP, en le liant dans cette “union nationale” contre tous les opposants actuels et à venir. L’effet Gülen, qui désorganise institutions et fonctions d’état, poussera l’AKP vers une réorganisation à son tour “parallèle”, resserrée autour d’Erdogan.
La chanson de la “démocratie” n’a pas fini d’incarcérer en boucle.