En Turquie la tor­ture est une insti­tu­tion qui accom­pa­gne les “insti­tu­tions” répres­sives d’E­tat. La soit dis­ant “vio­lence légitime” de l’E­tat passe par elle, con­tre tous les opposants politiques.

Dans les années 90, la tor­ture fut, sans retenue l’arme employée con­tre les mil­i­tants kur­des et les vil­la­geois par les forces armées et leurs mil­ices sup­plé­tives. Cette tor­ture s’ac­com­pa­gna des “dis­pari­tions” en nom­bre. Elle con­sti­tua un instru­ment “ter­ror­iste” à l’en­con­tre des pop­u­la­tions. Leurs auteurs, pour ceux qui furent iden­ti­fiés, ont été “blan­chis” en 2015, pour les derniers. Les autres mil­i­tants de gauche ne furent pas épargnés non plus, lors des empris­on­nements… Erdo­gan, rap­pelons-le, n’é­tait pour­tant pas au pou­voir, il ne faut jamais l’oublier.

Par la suite, à par­tir de 2002, en prévi­sion des négo­ci­a­tions d’ad­hé­sion de la Turquie à l’UE, la ques­tion de la tor­ture est rev­enue aus­si dans l’ac­tu­al­ité. La Turquie a fait des “efforts”, les com­mis­sari­ats ont été équipés de caméras, et de murs vit­rés dans un souhait de “trans­parence”. Les machines et out­ils de tor­ture avaient dis­parus des com­mis­sari­ats, et pour­tant elle a con­tin­ué à être pra­tiquée d’une façon certes moins sys­té­ma­tique, plutôt psy­chologique, ou sans laiss­er de traces… Il ne faut pas oubli­er que “tor­ture, tolérance zéro” fut un des argu­ments d’Er­do­gan, pour se faire élire…

Depuis le retour des vio­lences, le cli­mat de con­flit, et plus pré­cisé­ment depuis un an, la tor­ture est rev­enue de plus belle et avec de nou­velles tech­niques et trou­vailles pour con­tourn­er les sys­tèmes de sur­veil­lance mis en place. Par exem­ple, la pra­tique de la tor­ture pen­dant le trans­port, entre le lieu d’ar­resta­tion et le com­mis­sari­at, en s’ar­rê­tant sur la route…

La direc­tion générale du IHD (Asso­ci­a­tion des Droits Humains) a fait une con­férence de presse à Urfa, pour ren­dre publiques les obser­va­tions faites lors des entre­tiens avec les per­son­nes arrêtées et empris­on­nées dans les dernières périodes.

Eren Keskin, avo­cate, Atil­la Yazar, Prési­dent du IHD d’Urfa, Ley­la Coşkun, Co-prési­dente du DBP (Par­ti des Régions Démoc­ra­tiques) Urfa, Ayşe Sürücü, Co-prési­dente du HDP Urfa, Golay Koca, mem­bre du com­mis­sion de Droit du DBP, et des représen­tant-es des organ­i­sa­tions de société civile pro­gres­sistes étaient présents à la con­férence de presse.

torture

Con­férence de Presse IHD

Tolérance torture non pas zéro mais illimitée !

Ail­la Yazar a com­mencé la con­férence en rap­pelant que Hurşit Kül­ter, respon­s­able du DBP de Şır­nak est tou­jours porté disparu.

Ensuite, Eren Keskin a par­lé du con­tenu des entre­tiens effec­tués dans les prisons :

Il y a longtemps, Tayyip Erdo­gan, alors Pre­mier Min­istre avait déclaré « zéro tolérance pour la tor­ture ». Mais je pense que la tolérance est plutôt illim­itée aujour­d’hui encore… Les vécus que nous avons écoutés sont lit­térale­ment hor­ri­bles. Je tra­vaille sur la tor­ture depuis vingt ans. Je n’avais pas con­staté cer­taines méth­odes, même dans les années 90. Nous avons observé égale­ment, que la tor­ture est une poli­tique d’Etat, et qu’elle est pra­tiquée d’une façon sys­té­ma­tique. Ceux qui la pra­tiquent ne sont pas seule­ment la police et l’armée. Les pro­cureurs qui ne l’interrogent pas, les médecins qui ne l’attestent pas, la médecine légale qui est habil­itée pour les exper­tis­es sont tous, la “sci­ence” de la tor­ture. Ils l’exercent et l’ad­min­istrent tous ensemble.

La plu­part des pris­on­niers avec lesquels nous nous sommes entretenus, sont majori­taire­ment des poli­tiques, civils mem­bres du BDP. A Urfa, il y a défini­tive­ment, une approche qui a comme objec­tif, d’empêcher la poli­tique civile, et d’entraver ce parti.

Une caverne de torture à Ceylanpınar

Le pris­on­nier Mazlum Dağtekin, nous a infor­més de l’existence d’une cav­erne équipée d’outils de tor­tures à Cey­lan­pı­nar. Per­son­ne ne sait cela. Selon le témoignage de Mazlum Dağtekin, la tor­ture est pra­tiquée sous le con­trôle du Pro­cureur. D’abord les yeux sont bandés, ensuite un sac est passé sur la tête, et les yeux sont de nou­veau bandés par dessus le sac. Cette pra­tique sur les yeux n’existait pas dans les années 90. Le désha­bil­lage inté­gral est une des étapes prin­ci­pales. Mazlum témoigne : « Ils ont mis ma tête dans un seau. Ils m’ont vio­lé. Ils m’ont désha­bil­lé et intro­duit une matraque dans mon anus. Ils m’ont fait asseoir sur un fau­teuil, attachés mes pieds avec du fil de fer de con­struc­tion, et menot­té mes mains au fau­teuil. Ils m’ont frap­pé au ven­tre, à la poitrine avec des matraques et aux poings. Ils m’ont pen­du dans un puits, attaché par une corde sur mes poignets. Un des policiers a décou­vert son pénis et m’a demandé de le léch­er. Et pen­dant tout cela le Pro­cureur était avec nous. »

Il a tiré sur la tête

Eren Keskin, a expliqué qu’après les actes de tor­ture, le détenu a été emmené par les policiers à l’hôpital.

Le médecin s’est fait remet­tre en place lorsqu’il a réag­it en dis­ant « Mais dans quel état vous l’avez mis ? Com­ment peut-il se tenir debout ? ».

Il a témoigné égale­ment qu’il a enten­du que les policiers dis­aient « Faisons lui la même chose qu’on a fait à Hacı Lok­man Bir­lik ». Ensuite les policiers ont sor­ti le détenu dehors, ils lui ont attaché les pieds et mis une arme sur la tête. Ils ont dit à Mazlum, qu’il val­lait mieux pour lui mourir et ont glis­sé sa main sur l’arme tenue à bout por­tant sur sa tête. Mazlum affirme qu’il a vrai­ment voulu mourir et qu’il a appuyé sur la gâchette sans réfléchir. Mais l’arme n’était pas chargée. Il a exprime à quel degré il voulait mourir à cet instant. Pouss­er un être humain, jusqu’au point où il préfér­erait mourir est la plus grande des tor­tures. Mazlum n’est à ce jour pas sor­ti de cet état d’esprit. Il a absol­u­ment besoin d’une thérapie mais il est lais­sé seul avec ce traumas.

« Une équipe spéciale, venue d’Ankara… »

Eren rap­porte que 4 des 5 détenues femmes dont les témoignages ont été recueil­lis, ont subies de lour­des tor­tures sexuelles.

Avant tout, l’interrogation dénudée, est un délit d’agression sex­uelle. Elles ont été toutes inter­rogées nues.

Elles ont subi des attouche­ments et une méth­ode de tor­ture que je ne peux pas exprimer ici, a été util­isée. Elles ne souhait­ent pas que nous com­mu­niquions ces infor­ma­tions. Pen­dant notre tra­vail de vingt ans sur la tor­ture, nous avons con­staté que les femmes tor­turées révè­lent et expri­ment la tor­ture sex­uelle très dif­fi­cile­ment. Car en con­séquence de moral­ité imposée (namus), elles ressen­tent de la honte. Nous les com­prenons, mais leurs témoignages seront inclus dans notre rap­port et nous les trans­met­trons à l’ONU.

La Sécu­rité de Urfa, pra­tique des méth­odes incon­nues dans les années 90.

« Nous sommes une équipe spé­ciale. Nous sommes venus d’Ankara pour vous. Nous allons pra­ti­quer toutes sortes de tor­tures pour vous faire par­ler ! ». Voilà com­ment ils se présen­tent à tout-es les détenu-es.

La police dit « Pas d’agression »

Eren Keskin pré­cise que des plaintes seront déposées à l’Ordre des Médecins de Turquie, pour dénon­cer les médecins.

Quand les patient-es sont emmené-es à l’hôpital, les médecins passent la tête par la fenêtre des véhicules et deman­dent « Y a‑t-il de l’agression ? » La police répond « Il n’y a pas d’agression ». Alors les médecins étab­lis­sent et sig­nent les attes­ta­tions sans sig­naler l’agression. Il s’agit claire­ment d’une vio­la­tion de loi.

Les prob­lèmes posés à nos cama­rades avo­cat-es sont égale­ment dans l’illégalité. Les détenu-es ne peu­vent être entretenus qu’avec des avo­cats souhaités par la police.

Sur tous les plans, il est ques­tion d’une sit­u­a­tion con­traire à des con­ven­tions inter­na­tionales dont la Turquie est sig­nataire : La tor­ture est pra­tiquée. Elle est pra­tiquée en présence du pro­cureur. Les médecins fer­ment ou sont oblig­és de fer­mer les yeux.

Par exem­ple, une des détenues, İnci Kork­maz a un malaise. Les policiers soupçon­nent une crise car­diaque et l’emmènent à l’hôpital. Le médecin, con­state l’état de la patiente et dit « ne la ramenez pas dans cet état », mais suite à l’insistance des policiers, il fait un piqûre, et la patience est ramenée. Ceci est totale­ment con­traire au ser­ment d’Hippocrate.

Le Bureau de Lutte anti-ter­ror­iste d’Urfa est claire­ment un cen­tre où la tor­ture est pra­tiquée. Ils se trou­vent absol­u­ment légitimes et je pense qu’ils se com­por­tent encore plus en lib­erté, après les dernières lois mis­es en vigueur.

Enquête ?

A la fin de la con­férence de presse Eren Keskin a déclaré que le rap­port inté­gral sera bien­tôt partagé avec l’opinion publique et a fait appel à des organ­i­sa­tion internationales.

Nous devons appel­er les états sig­nataires des con­ven­tions inter­na­tionales. La Turquie vio­le claire­ment les con­ven­tions qu’elle a rat­i­fiées. Elle doit être inter­rogée. La Con­ven­tion de Genève est piét­inée, la con­ven­tion des droits de l’homme est piét­inée… La Sécu­rité d’Urfa doit faire l’ob­jet d’une enquête.

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Ces entre­tiens et obser­va­tions ont été faits à Urfa, mais il ne s’agit mal­heureuse­ment pas d’un cas isolé. De nom­breux témoignages démon­trent que ces pra­tiques sont général­isés et méthodiques.

Un exem­ple récent, par­mi tant d’autres, est le témoignage de Ser­van Kaya, étu­di­ant de l’Université d’Afyon, mis en garde à vue le 1er juin, par la Police à Istan­bul, dans le quarti­er Gazi. Le jeune homme a com­paru le 3 juin devant le tri­bunal et a été arrêté pour être mem­bre de YDG‑H (Mou­ve­ment de la jeunesse patri­o­tique révolutionnaire.)

Son témoignage a été recueil­li la semaine dernière, par un ami étu­di­ant Erdal Çağlar et son avo­cat Hüseyin Boğatekin, qui se sont entretenus avec Ser­van à la prison de Silivri d’Istanbul. Ce témoignage pub­lié aujourd’hui, fait écho à la con­férence de presse de l’IHD.

Ser­van exprime qu’il a été agressé par la police, alors qu’il mar­chait dans la rue, et mis en garde à vue. Ensuite il a été trans­porté dans un blindé, vers une zone boisée en dehors d’Istanbul. Il affirme avoir subi des tor­tures dans cet endroit isolé et que les policiers lui ont mis une arme sur la tête en le menaçant « Nous allons te tuer, nous ne te lais­serons pas vivre, tu ne quit­teras pas cet endroit vivant. »

Ser­van pré­cise que la police, ne réus­sis­sant pas à lui faire sign­er la dépo­si­tion qu’elle avait pré­parée, a « servi » son cas aux médias pro-gou­verne­ment, et qu’il a été pris comme cible par cette presse et même au delà, alors qu’il était encore en garde à vue, par des arti­cles l’identifiant tels que « Le Néron du PKK », « Le respon­s­able de YDG‑H ».

Son avo­cat souligne que Ser­van, trans­féré à la prison de Silivri a subi des agres­sions dès son arrivé, et ensuite mis en cel­lule d’isolation. Me Hüseyin Boğatekin, a pu s’en­tretenir avec son client seule­ment au 2ème jour de son arrivée à la prison et con­stater sur son corps des con­tu­sions, oedèmes et écorchures, mar­ques de tor­tures, encore vis­i­bles aujourd’hui. L’avocat, pré­cise que Ser­van a subi la vio­lence physique, mais aus­si des méth­odes déshonorantes.

La police a pris de force des pho­tos de mon client mis à nu et a men­acé de dif­fuser ces pho­tos partout.

Je me suis entretenu avec le Pro­cureur et je lui ai pré­cisé que mon client avait subi des tor­tures, mais le médecin ne les avait pas attestées. Le Pro­cureur n’a pas fait quoi que ce soit.

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En avril 2016 déjà, la Com­mis­sion con­tre la tor­ture de l’ONU (UNCAT), lors de sa 4ème ses­sion, avait observé les rap­ports sur la tor­ture en Turquie, de la TIHV, (Fon­da­tion des Droits de l’Homme de Turquie - rap­port), IHD, (Asso­ci­a­tion des Droits de L’homme — rap­port), HRW (Human Rights Watch), le Bar­reau d’Ankara, Glob­al Deten­tion Project ve Lon­don Legal Group.

Voici un petit résumé dont les tweets de la TIHV, pub­liés depuis la session.

La délé­ga­tion de Turquie avait répon­du aux ques­tions qui con­cer­naient en principe les dernières 6 années, en nar­rant l’histoire ottomane et le Moyen-âge européen…

La délé­ga­tion a répon­du aux ques­tions con­cer­nant le statut, le droit du tra­vail et la sit­u­a­tion juridique actuelle des migrants syriens, par des extraits de con­ven­tions dont elle est signataire.

La délé­ga­tion a répon­du aux ques­tions con­cer­nant les migrants ‘dis­parus par la force’, « qu’il ne s’agit que de ces thès­es sans fonde­ment des organ­i­sa­tions de société civile. »

Sur la ques­tion des défenseurs des droits de l’hommes en déten­tion : « Aucun défenseur de droits de l’homme n’est en prison pour cette activité. »

Con­cer­nant la pra­tique de la tor­ture durant les gardes à vue : « Dans les zones de réten­tion il existe des caméras et d’autres pré­cau­tions. Ces thès­es ne sont pas fondées et irréal­istes. »

La délé­ga­tion n’a ni par­lé des caméras « en panne » dans des com­mis­sari­ats, ni répon­du sur la pra­tique des tor­tures dans des zones qui ne sont pas con­sid­érées offi­cielle­ment comme zones de rétention.

Les ques­tions suiv­antes ont été posées à la délé­ga­tion de Turquie :

  • Vous dites que les organ­i­sa­tions de société civile peu­vent accéder dans les pris­ons, com­ment se fait-il que de nom­breuses plaintes expri­ment le contraire.
  • Vous avez répon­du à la ques­tion sur la liste des jour­nal­istes du DIHA (Agence Info Dicle) et des mem­bres de IHD (Asso­ci­a­tion des Droits de L’homme) détenus comme « C’est du ter­ror­isme et une cam­pagne de calom­nies con­tre l’Etat. » Quelles sont vos preuves ?
  • Au lieu de nous par­ler de vos pra­tiques de pré­cau­tion, pour­riez-vous nous expli­quer de quelle façon le mécan­isme de sur­veil­lance instal­lé est « indépendant » ?
  • Com­bi­en de per­son­nes vic­times de tor­tures ont béné­fi­cié des ser­vices de traite­ments et de réha­bil­i­ta­tion de l’Etat ? Et pourquoi avez-vous quit­té ce pro­jet européen en 2014 ?
  • Vous avez affir­mé avec insis­tance que vous êtes un pays démoc­ra­tique. Com­ment expliquez-vous autant de plaintes de vio­la­tion ? Com­ment comptez-vous respecter la Con­ven­tion con­tre la torture ?
  • Felice Gaer, rap­por­teur de Turquie pour la com­mis­sion, a ajouté que la Turquie pos­sède le droit d’autodéfense dans la « lutte con­tre le ter­ror­isme », mais qu’il est inquié­tant que les pra­tiques comme celle des cou­vre-feux ren­dent dif­fi­cile la vie des civils.

La délé­ga­tion de Turquie a répon­du « Des jeux sont joués con­tre la Turquie ».

Même si l’his­toire rat­trape tou­jours quelques respon­s­ables, elle nous fait dire aus­si que la majeure par­tie d’en­tre eux passent entre les mailles du filet. Et ce n’est pas l’actuel état des juri­dic­tions inter­na­tionales, où les états financeurs sont juges et par­tis, qui nous con­va­in­cront du contraire.

Le com­bat con­tre la tor­ture ne relève pas seule­ment d’un com­bat pour l’hu­man­ité, mais rejoint celui pour la jus­tice indépen­dante, et la néces­sité de traduire les “respon­s­ables” devant des juri­dic­tions inter­na­tionales “autonomes”.

Ces enquêtes et témoignages procè­dent de ce proces­sus lent. Les porter à la con­nais­sance de tous fait par­tie de la chaîne, d’au­tant que les réseaux soci­aux con­stituent un partage pub­lic majeur util­is­able largement.

Dans l’im­mé­di­at, un “la tor­ture en Turquie, c’est pas éton­nant” con­stituerait non seule­ment une réflex­ion “ori­en­tal­iste” de plus, mais surtout une façon d’ou­bli­er que les appareils d’E­tat, quels qu’ils soient, où qu’ils soient, et en toutes épo­ques, sont avant tout un moyen de “ter­ror­isme” con­tre les opposants et les pop­u­la­tions, pour défendre et faire per­dur­er des sys­tèmes de pou­voir et d’oppression.


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