Hansjörg Haber, chef de la délégation européenne en Turquie, avec statut d’ambassadeur, a démissionné de son poste ce 13 juin.
Il aurait eu des paroles jugées inappropriées par les autorités turques au sujet de l’accord sur les migrants.
Rappelons que ce diplomate est allemand, et que le récent vote sur le « génocide des Arméniens » n’a pas du arranger les choses.
Il avait déjà été rappelé au ministère des affaires étrangères turc à Ankara en mai, pour recevoir une « protestation officielle » concernant ses propos malheureux.
Ceux-ci, il est vrai, n’étaient pas du meilleur crû, et le fond du sujet méritait mieux.
Il aurait en effet déclaré à propos des négociations sur la suppression des visas d’entrée pour les ressortissants turcs dans l’Union Européenne :
Nous avons un proverbe : “Commencer comme un Turc et terminer comme un Allemand.” Mais c’est l’inverse qui s’est produit ici. Cela a commencé comme un Allemand et s’est terminé comme un Turc.
Et ce, pour exprimer que ces négociations devenaient du grand n’importe quoi, du fait des demandes non satisfaites de l’UE, qui en échange portent sur un « assouplissement » des « mesures anti terroristes » du gouvernement, et de la loi qui les contient.
« Aucun ambassadeur n’a le droit d’humilier le peuple du pays dans lequel il se trouve ou de dire quelque chose à propos de son président. C’est la première règle de la diplomatie », avait estimé alors le ministre aux affaires européennes turc, Volkan Bozkir, parti depuis, lui aussi.. De là à l’inculper pour “injure au Président”, comme le sont pour un oui pour un non nombre de membres de la société civile turque, il n’y a qu’un pas…
Bref, il a présenté sa démission, sans doute un peu forcée par les deux parties… Exit le diplomate.
L’accord conclu entre la Turquie et l’UE le 18 mars, s’il porte sur la rétention des migrants aux frontières de l’Europe, était assorti de clauses dont l’exemption de visas Schengen, en plus des Milliards d’Euros promis. Et comme l’UE a en attente plus de 70 critères en discussion pour “accélérer le processus de rapprochement”, dont les questions « antiterroristes, les choses patinent.
Difficile en effet de fermer les yeux trop ostensiblement sur la répression tous azimuths du régime AKP à l’encontre de ses intellectuels, de son opposition politique, et des populations kurdes. Même si une bonne partie des opinions européennes virent xénophobe, il n’empêche que les protestations contre ces accords existent et… que les partis populistes d’extrême droite n’apprécient guère la Turquie… Par racisme anti musulman, ça va de soi. Les partisans de régimes totalitaires ne se reconnaissent pas toujours entre eux.
Il devient donc facile de s’abriter derrière une clause qui crée la mésentente, pour laisser filer le marchandage sur les migrants, qui lui, est honteusement en début d’application.
L’UE doit rendre des comptes ce mercredi sur l’avancée des négociations pour l’application de l’accord. On en saura davantage que la démission d’un comparse.
Elle passera aux yeux de l’opinion publique pour « démocrate », même si un de ses ambassadeurs doit manger son chapeau, et que les procédures d’échanges ont pourtant commencé, accompagnées d’ailleurs des premières expulsions illégales de réfugiés vers leurs pays d’origine de la part du gouvernement turc.
En effet, le gouvernement turc en fait à sa tête.
Il refuse également de souscrire à cette demande “d’assouplissement”, alors, dit-il, qu’il est confronté au « terrorisme ».
Le nouveau premier ministre, Binali Yildirim, a déclaré devant le Parlement :
Nous menons une lutte acharnée pour l’unité et la survie de notre pays … il ne peut absolument pas y avoir de changement » dans les lois antiterroristes
Le régime turc est conscient que la date initiale pour l’exemption de visa, fixée avant le 1er juillet, ne sera pas tenue. Mais la promesse d’Erdogan était électorale…
Pour ce qui est des milliards réclamés par Tayyip, là, l’UE a capitulé d’avance, dans le grand marchandage, avec le sourire.