Un Premier ministrable est sorti du chapeau de l’AKP, ou plutôt de la réunion de son “comité exécutif”. Il s’agit de Binali Yıldırım, actuellement Ministre des Transports. C’est un membre du sérail, fidèle allié de Recep Tayyip Erdoğan, depuis qu’il l’a soutenu à l’élection pour la Mairie d’Istanbul en 1994.
Le Parti de la justice et du développement (AKP) a annoncé le jeudi 19 mai qu’il présentait comme candidat unique à la succession du Premier ministre sortant Ahmet Davutoğlu
Architecte des grands travaux d’urbanisation supervisés par Erdoğan, Binali Yıldırım, 60 ans, sera donc formellement élu à la tête de l’AKP dimanche lors du congrès extraordinaire. “Nous travaillerons dans une harmonie totale avec tous nos camarades du parti à tous les niveaux, à commencer par notre président fondateur et leader Recep Tayyip Erdoğan”, a‑t-il déclaré dans un discours après avoir été désigné candidat unique. On n’en attendait pas moins.
Ahmet Davutoğlu devrait remettre sa démission dès lundi à Erdoğan, qui confiera à son successeur la tâche de former le nouveau gouvernement. Davutoğlu avait confirmé qu’il ne briguerait pas de nouveau la présidence de l’AKP renonçant de fait à s’opposer davantage à la volonté de Recep Tayyip Erdoğan d’établir un régime présidentiel.
Binali Yıldırım, moustachu comme demandé, est ce que le régime a trouvé de plus docile, ne risquant pas de s’opposer au Sultan. Pas de surprises à attendre sur la reprise des négociations avec le PKK ou les dossiers de journalistes en procès. Pas d’évolution sans doute non plus sur la “loi terrorisme”, qui recoupe ces questions, et que la Communauté Européenne a critiqué.
La principale tâche du prochain chef du gouvernement sera de pousser le projet de changement de Constitution souhaité par Erdoğan pour transférer l’essentiel des pouvoirs exécutifs du Premier ministre au Président.
Mais, l’instabilité politique, et le projet de présidentialisation troublent les marchés financiers.
Signe de cette inquiétude, annonce Reuters, la livre turque a perdu 5 % de sa valeur par rapport au dollar, au cours du dernier mois…
Ainsi, au terme d’une suspens “insoutenable”, vient donc d’être désigné un chef de l’exécutif à la botte d’Erdoğan, via l’appareil politique de l’AKP. Alors que le Parlement doit décider ce vendredi la levée de l’immunité parlementaire pour des élus HDP, l’ancien gouvernement expédie les affaires courantes, Erdoğan a marié sa fille avec un digne représentant du secteur de l’armement, et les arrestations et emprisonnements de journalistes se poursuivent. Au Kurdistan turc, pour changer, les bombardements continuent sur les villes assiégées, et deviennent aériens…
Personne ne regrettera pourtant Davutoğlu, qui de Davos à Berlin en passant par Bruxelles, commençait sans doute à friser la moustache d’Erdoğan. C’est lui qui avait négocié l’accord sur les réfugiés, et sans doute tendu un peu trop l’oreille côté Merkel, concernant certains “assouplissements” nécessaires… Exit le Premier Ministre… Et vive la transparence du suivant !