Nous partageons ce joli poème, Ninni, croisé sur Twitter, entre les publications d’infos. Il ne peut être plus actuel…
Non, pas écrit par un poète ou une poétesse de renom, mais par une élève de Mardin, et envoyé par son professeur, à la journaliste écrivaine Ece Temelkuran, après lecture d’un de ses livres :
« Devir », “Epoque” en français, raconte la période qui a précédé le coup d’Etat du 12 septembre 1980 en Turquie, la dynamique révolutionnaire, le mouvement étudiant, les luttes ouvrières, vue à travers les yeux d’un enfant.
Ece, avec son dernier roman, “À quoi bon la révolution si je ne peux danser”, avec son titre original “Düğümlere Üfleyen Kadınlar”, était l’invitée du Festival “Etonnants Voyageurs”, qui s’est déroulé à Saint Malo du 14 à 16 mai dernier.
Devir’i okuyup öğrencisinin bu şiirini gönderen Öğretmen Bengin Arin’e teşekkürler. Mardin’e selam. pic.twitter.com/hay2e8wbjp
— Ece Temelkuran (@ETemelkuran) 18 mai 2016
Berceuse
L’époque est obscure, l’époque est nuit
Il est minuit dans une nuit lucide
Certains ont éteint les étoiles, ont fait pleurer le ciel
L’époque est fatiguée, l’époque est malade…
Une lune restée manquante dans le ciel
La terre est maussade, odeur de sang dans l’air
L’époque est insomniaque, l’époque est malheureuse
Mon pays dont l’oreiller est mouillé de larmes
L’époque est liberté interdite
L’époque est rues interdites.
Qui sont les chauve-souris qui volent dans cette obscurité damnée ?
Qui sont ces loups qui hument l’odeur du sang ?
Mon pays reste éveillé avec la berceuse qui murmure la paix
Qui sont ceux qui fouillent les poubelles d’une rue abandonnée ?
Qui est la cause de ce vent maudit ?
Quel est la raison de ce vacarme ?
Et ces lamentations familières aux voix éraillées ?
Pourquoi certains bombardent l’humanité ?
L’époque est junte,
L’époque est cinéma muet,
L’époque est soleil masqué en ce jour.
Chante une berceuse, que mon pays s’endorme
Qu’ils s’endorment les mains souillées et qu’ils ne puissent se réveiller.
Qu’ils ne puissent se réveiller, les visages entachés.
Chante une berceuse à mon pays
Qu’il s’endorme et qu’il se réveille à la paix.
Que la paix ne soit pas un rêve,
Que la paix ne reste pas dans les rêves.
Atiye Çakmak
Mardin 2016
> Illustration
Dessin de Zehra Doğan, journaliste de JINHA.
Vous pouvez voir aussi ses dessins dans l’article “Journaliste, Zehra dessine l’innommable” et lire le reportage de Kedistan avec Zehra.
> A l’écoute
Ninni de Mircan Kaya
> En bonus
Grup Yorum, qui interprète un poème du grand poète Ahmed Arif, “Adiloş bebe”.
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