Ce matin dès les premières heures, plusieurs descentes de police ont été effectuées sur 35 adresses habitées par des avocats, dans six villes de Turquie.: Diyarbakır, Batman, Antalya, Ankara ve Sakarya et 15 communes d’Istanbul. « L’opération PKK » s’est terminée par la mise en garde à vue de 29 « suspects » l’arrestation de neuf avocats, membres de « Özgürlükçü Hukukçular Derneği » (ÖHD — L’association des Juristes Libres » : İrfan Arasan, Ayşe Acınıklı, Hüseyin Boğatekin, Şefik Çelik, Adem Çalışcı, Ayşe Başar, Tamer Doğan, Ramazan Demir et Mustafa Rüzgar. Les motifs de leur arrestation n’ont pas été révélés sous prétexte de « dossiers mis sous secret ».
Ramazan Demir, avait fait des demandes à la Cour européenne des droits de l’homme, pour les blessés coincés dans les sous-sols à Cizre le mois dernier, et obtenu des décision de protection pour certains. Il était intervenu également, à la défense des trois universitaires arrêtés hier, membres du groupe « Universitaires pour la Paix » et qui avaient signé en début janvier 2016, l’appel « Nous ne serons pas complices ».
Hüseyin Demir faisant partie des 9 avocats arrêtés. Quant à lui, il serait intervenu pour la défense de Seher Çağla Demir, personne “déclarée” comme la responsable de l’attentat d’Ankara, lors d’un procès qui s’était déroulé à Balıkesir. Ce procès est bien antérieur à l’attentat.
Selon DHA, les responsables du bureau de lutte contre le terrorisme, de la Direction de Sécurité d’Istanbul, ont annoncé que les descentes et gardes à vue ciblaient le PKK.
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Par ailleurs Tayyip Erdoğan, dans un discours donné à l’inauguration d’ATO Congresium s’exprimait :
L’organisation terroriste qui a fait exploser une bombe et provoqué la mort de gens au hasard, puisse-t-elle avoir le moindre lien avec la démocratie ? Si malgré cela nous ne qualifions pas ceux qui utilisent le même langage que le leader d’organisation terroriste et qui n’hésitent pas à montrer la même attitude, de « terroristes », qui appellerons-nous comme cela?
Il y a encore des organes de médias qui prennent la défense de ceux-là. Certains ambitieux incapables, sont des misérables, des immoraux et sans honneurs, allant jusqu’à penser à utiliser l’événement grave de Kızılay. Aucun adjectif, ne peut être le voile au fait d’être disciple de l’organisation terroriste.
Nous devons refaire la description du terrorisme de nouveau et immédiatement. Nous devons changer notre Code Pénal tout de suite. Sur ce sujet le Parlement doit faire son pas avec rapidité. Celui qui est de notre côté dans la lutte contre le terrorisme est notre ami, celui qui est en face, est notre ennemi. Il faut que cela se sache. Le problème est si clair et net.
Après l’arrestation de trois d’entre eux hier, une petite pensée pour les universitaires qui ont invité le gouvernement à arrêter les affrontements et les opérations dans le Nord Kurdistan (Sud-Est de la Turquie) :
Vous avez vu, quelle approche ont eu les brouillons d’intellectuels de cet événement ?
Les médias d’opposition ne sont pas oubliés :
Vous avez vu quelles publications ont fait certains lambeaux [équivalent du torchon en français]. Ils mettent la manchette « Qu’elle aille au diable ta Présidence* » et puis je ne sais plus quoi. Nous, on fait des déclarations sur ce qu’il faut faire. Votre soucis c’est diviser, séparer ce pays. Nous n’allons pas permettre de diviser ce pays.
*Voir la vidéo dans l’article : “Les suites de l’attentat à Ankara”
Les auteurs, chroniqueurs et journalistes en prennent aussi pour leur compte :
Après les dernieres attaques terroristes, nous ne pouvons pas avoir la moindre miséricorde, la moindre clémence pour l’organisation terroriste. Il ne peut avoir certains qui donnent des messages contradictoires à cela et je voudrais préciser que je vois ceux qui donnent ces messages dans les rangs de ceux qui servent l’organisation terroriste. Allons bon, il serait chroniqueur, il exprimerait son opinion… Peu importe ce que tu es, cela ne me conviens pas. Si ton crayon prend place du côté du terroriste, tu es en face de moi.
Et tout cela, inutile de le préciser pour la centième fois, dans la grande indifférence de la “diplomatie” des états européens, qui ont le culot de reparler de leur intention de continuer les commissions pour l’intégration européenne de la Turquie, alors qu’ils savent eux mêmes que ce point est, des deux côtés, un cache sexe du marchandage, et que personne n’y tient.
Qu’un avocat qui avait fait saisir la Cour Européenne, soit, pour ce fait juridique, arrêté, devrait engager une levée de boucliers… Vous voyez l’ombre d’une réaction ?
Maintenant que ce qui reste de caricature d’Europe politique a placé le renard comme gardien du poulailler, chacun se moque des résultats et fait de la communication anti réfugiés face à son opinion publique. Que croyez vous que fera un tel régime, de la manne de réfugiés qu’il va en partie retenir ?
Vous trouvez la question hors sujet ?
Il va alimenter son “économie grise”, faite de trafics humains, de corruptions, de pression sur les salaires, et, malgré les chiffres de noyé(e)s en mer, qui dépassent le millier, continuer, comme savait si bien le faire la Libye, à exercer la pression contre la Grèce et l’UE, tout en recueillant le fruit des trafics côtiers qui compenseront le manque à gagner touristique. Par ailleurs, ses demandes répétées d’installer des camps au delà de sa frontière syrienne, là où le Rojava exerce sa souveraineté, restera de ce fait une exigence.
Il a même, subtile manoeuvre, fait “naturaliser” avant les élections de novembre, une partie de celles et ceux qui pouvaient lui être redevables… Pour garder aussi un pied en Syrie ultérieurement.
Voilà donc dans quel régime, où l’accusation de “proximité d’idées avec” devient un motif d’emprisonnement, seront laissé des exilés de guerre, qui ont déjà pour beaucoup subi le pire.
On a dépassé le “pouvoir fort islamo conservateur”, pour entrer dans la consolidation d’un fascisme rampant, capable d’instrumentaliser les attentats et la violence.
Mais, dans le même temps, c’est pour le moment, sans appui populaire absolu, ce qui continue de faire contradictoirement une fragilité intérieure.
Fort heureusement pour lui, la béquille européenne est là !
Image à la une : Avocat Tamer Doğan en sortant de sa domicile.