Erdoğan a une presse qua­si entière­ment con­quise et à sa botte. Et il s’en sert, pour faire pub­li­er des images, pho­tos et vidéos.

(Cet article, partagé sur facebook, a été censuré trois fois par le réseau social, pour “contenu à caractère dangereux” d’où son titre anodin et le lien de page ridicule “bisounours pour facebook”, pour éviter un nouvel effacement automatique)

On con­nais­sait les comptes tweet­ers appar­tenant à des mil­i­taires mem­bres des forces spé­ciales, comme ceux qui furent à l’o­rig­ine de la vidéo sur la « tor­ture » du corps de Hacı Bir­lik tué et traîné der­rière un blindé à Şır­nak en 2015, ou de la pub­li­ca­tion d’im­ages de corps de femmes com­bat­tantes dénudées et sup­pli­ciées comme celui de Kevs­er Eltürk tuée à Varto.

Ces méth­odes ne sont pas directe­ment appré­ciées par le pou­voir AKP, qui a tou­jours davan­tage fait relay­er par ses médias de soit dis­ant « enquêtes internes qui seraient faites », plutôt que les images elle mêmes. Les ultra nation­al­istes, les auteurs de graf­fi­tis sex­istes ou géno­cidaires, mili­ciens ou mil­i­taires, mènent aus­si « leur » guerre de pro­pa­gande, qui n’est pas tou­jours poli­tique­ment com­pat­i­ble avec l’AKP et sa clien­tèle bigote.

Là, pour­tant, depuis hier, on assiste à une prop­a­ga­tion d’im­ages et de vidéos pub­liées dans les tor­chons pro régime, visant deux objec­tifs : hum­i­li­er l’ad­ver­saire, décrédi­bilis­er les com­bat­tants, dans cette société ultra machiste, et ren­forcer l’idée que l’ar­mée turque sauve femmes et enfants de la « vio­lence » de ces derniers.

Rien de bien nou­veau là non plus, depuis des mois, les mêmes tor­chons font la même besogne, les uns après les autres. Mais là, le car­ac­tère mas­sif et coor­don­né paraît plus évident.

propagande

Dans ces pub­li­ca­tions en copi­er col­lés de ces deux derniers jours, il y a comme la main d’une offen­sive con­certée, alors qu’un som­met Europe Turquie par­le gros sous, et sou­tien à la Turquie, en fer­mant les yeux sur les mas­sacres et les exac­tions de ses forces armées, mem­bres de l’Otan.

Les témoignages des mas­sacres de Cizre qui brisent le mur de silence inter­na­tion­al, même de façon ténue, peu­vent expli­quer aus­si cette con­tre pro­pa­gande soudaine. On ne con­naît pas encore le Gooebels qui est derrière…

Des images de pris­on­niers nus, tenus en respect par des mil­i­taires, dans un décor de ruines, pris­es par les forces armées elles mêmes, s’é­tal­ent dans les pages, et sont repris­es ensuite sur les réseaux sociaux.

La Pré­fec­ture de Diyarbakır explique que ces « pra­tiques » sont des procé­dures visant à empêch­er la fuite, ou à décel­er d’éventuelles bombes humaines, ou cache d’armes blanch­es… L’ar­mée israéli­enne a les mêmes pra­tiques dans les ter­ri­toires pales­tiniens, on le sait.

Ce qu’on sait aus­si, c’est que la nudité est aus­si un mode d’hu­mil­i­a­tion, et qu’elle s’ac­com­pa­gne bien sou­vent d’in­jures, d’a­gres­sions et de quoli­bets sex­istes de la part des mil­i­taires. Ce qu’on sait aus­si, c’est que cette pra­tique, appliquée aux femmes, a con­duit aux sup­plices et tor­tures dont des pho­tos ont révélé l’existence.

De cela, dans les jour­naux « alliés » d’Er­doğan, il n’en est pas question.
On va même jusqu’à titr­er « le PKK s’est ren­du nu ! », glosant sur ces « PKK devenus inof­fen­sifs ». La même presse dif­fuse l’idée des « suc­cès » de l’of­fen­sive armée, et con­traire­ment à son habi­tude, ne par­le pas là de « ter­ror­istes attrapés morts », mais de « mem­bres d’or­gan­i­sa­tion ter­ror­istes prisonniers ».

L’ar­mée ne tue donc pas, con­traire­ment à ce qu’af­firme la « pro­pa­gande ter­ror­iste », elle arrête, net­toie, débarasse la pop­u­la­tion civile de la « vio­lence » et du « séparatisme », voilà le message.

Et s’il fal­lait le prou­ver, l’ar­mée fait des vidéos de « sauve­tages » dans les sous sols…

On y sauve des femmes et des enfants, on y fait des mis­es en scène avec du choco­lat, comme des « libéra­teurs américains »…

C’est la Com­mis­sion européenne qui va être contente !…

Sur cette vidéo mil­i­taire, on pour­rait super­pos­er d’autres images, qui elles n’ex­is­tent pas (ou peut être ont elles été filmées qui sait, selon les procé­dures…), de mil­i­taires inter­venant avec des grenades au phos­pho­re, ou d’autres moyens chim­iques de brûler celles et ceux qui périrent ain­si dans les caves de Cizre… Des images pour en effac­er d’autres, pour­tant présentes, dans les ruines de Cizîr, dans le quo­ti­di­en depuis, et dans toutes les têtes de ses habitants.

https://www.youtube.com/watch?v=_EGu-QMK-rU

Nous pub­lions donc ces images à notre tour. Non pas pour entr­er dans cette spi­rale de pro­pa­gande, mais pour la dénon­cer juste­ment, chercher à trou­ver une expli­ca­tion der­rière cette pro­fu­sion d’im­ages dans la presse turque, autre que la sim­ple humil­i­a­tion médi­a­tique du PKK, enne­mi juré d’Er­doğan dont il ne prononce jamais le nom.

Et puisque ces images ont été authen­tifiées par les autorités admin­is­tra­tives et mil­i­taires, bien qu’elles nient les avoir fait pub­li­er elles mêmes, arguant une nou­velle fois d’une « néces­saire enquête pour trou­ver les sources », rap­pelons que la dif­fu­sion d’im­ages humiliantes de pris­on­niers de guerre est un arti­cle de la Con­ven­tion de Genève, qui per­met ouver­ture d’en­quête, con­tre les forces mil­i­taires qui la pratiquent.

Voici des pho­tos pub­liées sur les réseaux soci­aux et dans les médias hier et aujourd’hui.

Lors des pre­mières paru­tions, cer­tains inter­nautes pré­tendaient que les pho­tos n’étaient pas pris­es en Turquie, d’autres con­damnaient le traite­ment de l’armée.

La pré­fec­ture de Diyarbakır, qui a d’abord annon­cé “aujourd’hui 14 per­son­nes dont 2 femmes et un enfant se sont ren­dus”, déclarait dans un pre­mier temps n’avoir pas d’informations sur ces photos.

L’après midi, la Pré­fec­ture de Diyarbakır a pour­tant fait une deux­ième déclaration :
« Le désha­bil­lage des per­son­nes qui se ren­dent, est une procé­dure de pré­cau­tion, afin d’éviter des sit­u­a­tions néga­tives, telles que bombe humaine, piège explosif, action sui­cide etc. Par ailleurs il a été con­staté que les les pho­tos appar­tenant à [il veut dire « de »] cer­tains indi­vidus ont été pris­es sans autori­sa­tion [de qui ? la leur ?] et ont été partagées [sous enten­du sur les réseaux soci­aux]. Sur ce sujet, notre Pré­fec­ture a mis immé­di­ate­ment en place une com­mis­sion et une enquête a été entamée. »

Bien sûr, de Hol­lande à Tsipras, Merkel et con­sort en pas­sant par l’Autriche et la Hon­grie, per­son­ne n’a rien vu, rien entendu.

Chu­u­ut, on négo­cie le prix du migrant !

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