Un sommet entre l’Union Européenne et la Turquie aura lieu le 7 mars à Bruxelles pour accélérer la mise en place d’un accord passé en novembre, sur les “migrants”.
Le président du Conseil européen, Donald Tusk, s’est déjà entretenu avec le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu et le président Recep Tayyip Erdogan pour préparer ce “sommet” qui avait été retardé par l’explosion d’Ankara contre un bus des forces armées turques.
Quelques propos en marge ont déjà été tenus par les uns et les autres.
« Il est hors de question d’arrêter immédiatement les migrations irrégulières. Nous n’avons pas de carte magique entre nos mains”, a par exemple déclaré Tanju Bilgiç, “mais nous avons besoin de temps pour lutter contre de façon déterminée. » La Grèce de son côté, a déjà renvoyé mardi en Turquie environ 150 migrants, ressortissants marocains, tunisiens et algériensen application d’un vieil accord de “réadmission” signé en 2002.
Et c’est dans le même esprit que le gouvernement turc a proposé de conclure de tels accords « avec 14 pays qui sont à la source de migrations irrégulières », comme l’a confirmé le porte-parole de son ministère des Affaires étrangères, Tanju Bilgiç, sans nommer les États concernés.
La Turquie et l’UE ont donc déjà conclu en novembre un accord dans lequel la Turquie s’engage à “ralentir le flux des migrants qui traversent la mer Égée depuis ses côtes jusqu’en Grèce voisine”, en échange d’une aide de trois milliards d’euros, pour l’instant, d’une accélération de sa procédure de candidature à l’UE, surtout sur les aspects commerciaux, et d’autres facilités d’entrée et de circulation pour ses ressortissants.
Bruxelles ne voyant rien venir pour l’instant, reproche de son côté à la Turquie de ne pas en faire assez pour stopper les réfugiés.
C’est donc le marchandage qui continue. Rappelons qu’il s’agit de centaines de milliers de vies d’êtres humains, réfugiés des guerres que chacun attise dans la région, de celles, plus anciennes, mais toujours actives, au nom de la “culture occidentale”, ou des plus récentes, entamées par des “alliés”, bons clients en armement, comme en Érythrée ou ailleurs. Il s’agit aussi, pour leur plus grand malheur, d’un exode dû à des conditions climatiques qui ont ruiné les économies locales, en même temps que la corruption de gouvernements qui se vendent aux multinationales de l’agro business. Bref, l’Europe de la finance refuse les effets de ses “dommages collatéraux”.
Et comme les populations européennes vieillissantes n’acceptent plus l’immigration que quand il s’agit de remplir les tâches qu’elle ne veut plus effectuer elle même, ou à l’inverse, pour piller les cerveaux et recevoir le “juste retour de ses aides au développement”, si un petit Aylan a ému un temps, la réalité du “tout pour ma gueule” a repris le dessus.
Ce n’est pas nouveau. L’Europe, au “bon vieux temps des colonies” n’avait aucune émotion à l’idée de Peuples en souffrance, tant elle dégustait son Banania. Elle en vint même à s’entre tuer pour les défendre à plusieurs reprises.
Ainsi, quand le mouvement kurde dit avoir pris bonne note du soutien qu’apportent les gouvernements européens à Erdogan, l’exonérant de rendre des comptes sur les massacres qu’il fait commettre, il parle d’une réalité qu’il faut admettre : ces tractations qui visent à “protéger” les populations européennes, d’une “invasion” de réfugiés et de migrants, justifient sans doute qu’en notre nom, des civils meurent dans l’indifférence, sur l’autel de la “lutte antiterroriste”.
Et quand la Cour Européenne elle même botte en touche et se déclare non compétente, les Ponce Pilate peuvent dormir tranquilles, jusqu’au prochain Bataclan.
Si dans un improbable “retour vers le futur”, on constatait de visu qu’Erdogan subissait le même sort qu’un Kadhafi un jour, à qui l’Europe avait aussi confié les clés de ses camps et la reconnaissance qui va avec, on ne serait pas plus étonné que ça.
On ne sait si c’est cette période d’histoire qui pourrit les politiciens, ou l’inverse. Parions pour les deux !
Mais ne nous exonérons pas de nos silences qui tuent.