Un groupe qui ne se cache pas d’avoir comme stratégie les « atten­tats con­tre les forces et biens de l’E­tat » a revendiqué l’at­ten­tat d’Ankara.

Il s’ag­it du TAK (fau­cons de la lib­erté au Kur­dis­tan), qui avait déjà revendiqué une explo­sion à l’aéro­port d’Is­tan­bul, en fait une attaque au morti­er le 23 décem­bre à Sabi­ha Gökçen, qui avait tué une personne.
Le gou­verne­ment avait min­imisé les faits à l’époque.

La presse inter­na­tionale titre sur la reven­di­ca­tion, avec la mar­que par­ti­c­ulière du com­mu­niqué orig­i­nal, « le TAK, proche du PKK ». Dans quelques arti­cles, on men­tionne un peu plus que cette « revendication ».
Le groupe affirme avoir agi «  pour venger les per­son­nes vul­nérables tuées dans les sous-sol de Cizre et nos civils blessés”. Il donne le nom d’un homme né en 1989 à Van (est), Zinar Raperin, présen­té comme l’auteur de l’attaque d’Ankara.

Cette reven­di­ca­tion con­tred­it la ver­sion « offi­cielle » qui attribuait l’ex­plo­sion à un cer­tain Sal­ih Necar, Syrien de 23 ans, présen­té comme proche des YPG (forces kur­des syri­ennes au Roja­va). Evidem­ment, la ver­sion offi­cielle per­me­t­tait davan­tage d’établir un ali­bi pour les frappes de l’ar­mée turque qui ont eu lieu sur Afrin et dans la région frontal­ière d’Azaz.

Le TAK, con­traire­ment à ce que repren­nent en boucle les médias, s’il n’est pas un enne­mi des Kur­des, bien sûr, ni du PKK, ne partage pas grand chose de ses reven­di­ca­tions d’au­tonomie, et con­sid­érait encore il y a peu que le PKK s’embourgeoisait et que le HDP « col­lab­o­rait » au sys­tème. Ce groupe a claire­ment choisi la lutte armée clan­des­tine, et relègue la réflex­ion poli­tique pour des « moments plus favor­ables ». Il s’ag­it pour eux d’af­faib­lir les « intérêts turcs » par tous moyens.
Dans ce qu’ils ont revendiqué, ils ont ajouté sur leur site inter­net : «Le tourisme est aus­si une cible que nous voulons détru­ire. Nous con­seil­lons aux touristes étrangers et turcs de ne pas aller dans les zones touris­tiques en Turquie»… «nous ne serons pas respon­s­ables de ceux qui mour­ront lors d’attaques dans ces secteurs».

revendiqué

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Pas facile, dans la dés­in­for­ma­tion qui règne, de valid­er aujour­d’hui cette respon­s­abil­ité revendiquée. Si la dif­fu­sion de cette reven­di­ca­tion ne peut être mise en doute, on ne voit pas encore ce soir, un change­ment de pied gou­verne­men­tal côté Davu­to­glu et Erdo­gan, juste le trait d’u­nion dif­fusé par les agences, « TAK, proche du PKK ».

Peu importe la prox­im­ité poli­tique ou stratégique, pourvu qu’on ait « l’i­den­ti­fi­ca­tion kurde ».

Cette explo­sion, qui est arrivée à un si bon moment pour Erdo­gan aura pour seules con­séquences les « repré­sailles du gou­verne­ment turc », sur les forces du Roja­va en pre­mier lieu, et c’est déjà com­mencé, et la pour­suite des mas­sacres au Kur­dis­tan Nord, que l’at­ten­tat était cen­sé dénoncer.

A force de « dénon­cer les politi­ciens trop proches du sys­tème », on finit par ne plus faire de poli­tique du tout, et pra­ti­quer des atten­tats à con­tre courant, qui per­me­t­tront au régime de con­forter une majorité à l’Ouest de la Turquie, que les cam­pagnes pour la paix avait déjà beau­coup de dif­fi­cultés à sensibiliser.

Vous savez bien qu’à Kedis­tan, nous n’avons pas un tem­péra­ment de bisounours.
Mais une telle reven­di­ca­tion, si la respon­s­abil­ité est avérée sans con­tes­ta­tion pos­si­ble, paraît par­ticiper de « l’inu­tile », et bien loin de con­stituer une « vic­toire mil­i­taire », sauf à vouloir entretenir à la fois un esprit de vengeance, peu promet­teur d’avenir, et main­tenir une divi­sion de pop­u­la­tions déjà qua­si insurmontable.

La lutte armée, quand elle n’est pas le pro­longe­ment, par­fois « obligé » ou ren­du néces­saire, d’une action poli­tique, n’ou­vre que des abîmes sup­plé­men­taires où les futures vic­toires vont se per­dre. L’his­toire est riche de ces voies poli­tiques sans issues.

Pour ter­min­er, vous ren­voy­er à vos médias préférés, serait vous ren­voy­er à “la voix de son maître”, via l’a­gence de presse turque offi­cielle aux ordres, seule source util­isée par nom­bre d’ar­ti­cles rapi­de­ment parus ici.

Mer­ci quand même à Reuters, qui annonce que “ce groupe avait aupar­a­vant déjà annon­cé avoir rompu avec les rebelles du Par­ti des tra­vailleurs du Kur­dis­tan (PKK), organ­i­sa­tion que le gou­verne­ment turc accuse d’avoir com­mis l’attentat”.

Voici ce que Kedis­tan don­nait comme infos en décem­bre 2015, à pro­pos de la tra­duc­tion d’une  pub­li­ca­tion sur le site des TAK, qui ont revendiqué la respon­s­abil­ité de l’explosion.

« Nous sommes indépen­dants du PKK et notre action va se propager dans toute la Turquie» 

Les Fau­cons de la lib­erté du Kur­dis­tan (égale­ment con­nus sous le nom de la lib­erté du Kur­dis­tan, Hawks Teyrêbazên Azadiya Kur­dis­tan, ou TAK) annon­cent une nou­velle ini­tia­tive en réponse à la poli­tique d’anéantissement menée con­tre le peu­ple kurde par l’E­tat turc et l’AKP.

La déc­la­ra­tion sur leur site offi­ciel aver­tit tout le monde que l’ac­tion va se propager à tra­vers la Turquie, qu’elle sera indépen­dante à l’é­gard du PKK ou de toute autre organ­i­sa­tion kurde. «C’est l’aube d’une péri­ode de com­bat ». Ils rap­pel­lent que l’at­taque au morti­er à l’aéro­port Sabi­ha Gökçen d’Is­tan­bul le 23 Décem­bre 2015 a été menée par eux et  déclar­ent que cette action mar­que le com­mence­ment  de leur nou­velle ini­tia­tive de lutte con­tre l’isole­ment imposé à İmr­alı du leader kurde Abdul­lah Öcalan par la “dic­tature fas­ciste” , et con­tre la “guerre totale exé­cutée con­tre le peu­ple kurde”. Les TAK ajoutent qu’ils ont pris ces déci­sions sur la base d’une éval­u­a­tion de la sit­u­a­tion récente, et qu’ils avaient aupar­a­vant sus­pendu leurs actions par respon­s­abil­ité et loy­auté envers le chef du peu­ple kurde Abdul­lah Öcalan et  le proces­sus de négo­ci­a­tions. «Notre champ d’ac­tion s’é­tend à toute la Turquie ». “Chaque insti­tu­tion et étab­lisse­ment de l’E­tat est une cible pour nous, et notre champ d’ac­tion s’é­ten­dra à toute la Turquie.”

Ils ajoutent : “Nous lançons un aver­tisse­ment non seule­ment à ceux qui mènent cette guerre mais aus­si à leurs com­plices, col­lab­o­ra­teurs et sym­pa­thisants. ” “Il doit être con­nu de tous, que les mil­i­tants de la lib­erté pour le Kur­dis­tan don­neront une réponse impi­toy­able et sans faib­lesse à l’Etat turc, agresseur impi­toy­able, auteur de mas­sacres et respon­s­able de la ter­reur con­tre le peu­ple kurde, sans dis­tinct­inc­tion entre les femmes, les enfants ou les jeunes.”

La Turquie toute entière sera bien­tôt autant en sécu­rité que Cizre, Silopi, Sur, Nusay­bin”. Les TAK déclar­ent qu’ils vont répan­dre la guerre sur l’ensem­ble de la Turquie, ajoutant : «Les gens en Turquie seront autant en sécu­rité que le sont les enfants kur­des, les jeunes, les mères, les per­son­nes âgées et les femmes à Cizre, Silopi Sur, Nusay­bin et Kerbo­ran, qui sont sous une pluie de mort propagée par les héli­cop­tères, les chars, les armes lour­des et les explosifs.”

«Notre vengeance traduit notre respon­s­abil­ité envers le Peu­ple Kurde» 

Soulig­nant que les TAK ripos­teront à chaque attaque et mas­sacre com­mis par ceux qui sont impliqués dans cette guerre, ils ajoutent que c’est de leur respon­s­abil­ité envers l’his­toire du Kur­dis­tan et des Kur­des que de pren­dre cette déci­sion de vengeance.

« Nous sommes indépen­dants du PKK qui est trop humaniste» 

Les cibles, le mode d’ac­tion et les tac­tiques menées par le PKK et d’autres organ­i­sa­tions kur­des en guerre ont un car­ac­tère très human­iste en face des méth­odes util­isées par le fas­cisme de l’E­tat turc con­tre le Peu­ple kurde. À cet égard, nous ne dépen­dons pas du PKK pour déter­min­er notre stratégie. Nous, en tant TAK déter­mineront et réalis­eront notre stratégie d’ac­tion de manière indépen­dante et con­for­mé­ment à la mis­sion que nous avons entrepris.”

Le 30 décem­bre 2015


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Daniel Fleury
REDACTION | Auteur
Let­tres mod­ernes à l’Université de Tours. Gros mots poli­tiques… Coups d’oeil politiques…