La bataille d’Alep risque bien d’avoir des con­séquences incal­cu­la­bles sur la suite de la guerre en Syrie. En effet, Turquie et Ara­bie Saou­dite vien­nent aujour­d’hui de par­ler d’in­ter­ven­tion au sol.

A plusieurs repris­es à Kedis­tan, nous met­tions en garde con­tre les com­mu­niqués pro­pa­gan­distes en prove­nance d’or­ganes de presse russ­es ou pro russ­es, qui fai­saient croire que « l’Ours » aurait bien­tôt rai­son de Daech et des dji­hadistes de toute nature en Syrie, per­me­t­tant des négo­ci­a­tions pour envis­ager un tour­nant en Syrie.

Nous avions souligné que les bom­barde­ments russ­es étaient ciblés, et visaient essen­tielle­ment à per­me­t­tre la pro­gres­sion au sol des troupes du régime de Bachar, appuyées par l’Iran.

Nous avions égale­ment men­tion­né que si cette offen­sive autour d’Alep pou­vait indi­recte­ment per­me­t­tre aux YPG de pro­gress­er dans leur recon­quête des enclaves et de ral­li­er des zones frontal­ières, cela était une bonne nou­velle mil­i­taire, mais présen­tait un dan­ger majeur.

Ne pas com­pren­dre que cette bataille d’Alep est comme une bombe à sous muni­tions et choisir un camp impéri­al­iste con­tre un autre dans ce con­texte, serait être sur­pris par ce qui peut suiv­re à très court terme.

On con­state déjà, que pour le régime syrien, chas­s­er devant lui les pop­u­la­tions civiles et les détourn­er égale­ment vers les zones kur­des autour d’Afrîn, désor­mais en dif­fi­cultés, est aus­si une tac­tique de guerre. Si on lui ajoute la ren­con­tre au som­met d’hi­er entre les deux grands impéri­al­ismes à l’oeu­vre dans la région, la Russie et les USA, pour une pseu­do demande de « cessez le feu », adressée en réal­ité plus aux com­bat­tants kur­des qui ten­tent de pro­gress­er vers Azaz et vien­nent de recon­quérir une petite base aéri­enne stratégique, on a la mesure de ce qui se pro­file : gel­er des avan­tages sur le ter­rain afin de retourn­er à Genève, avec ou sans les Kurdes.

C’est dans ce con­texte de guerre, que la Turquie et l’Ara­bie Saou­dite, ensem­ble dans la “coali­tion islamiste”, vien­nent aujour­d’hui de par­ler de pos­si­ble inter­ven­tion au sol et de bom­barde­ments à par­tir de la base aéri­enne turque stratégique que les améri­cains ont eux aus­si l’au­tori­sa­tion offi­cielle d’utiliser.

Bien évidem­ment, vous l’au­rez com­pris, la Turquie bom­bardera les kur­des, pour com­mencer, et souhaite jouer son dou­ble jeu habituel. Selon cer­taines sources, elle a d’ailleurs déjà dès aujour­d’hui bom­bardé des posi­tions repris­es par les YPG dans le secteur d’Alep.

Dans cet imbroglio mil­i­taro poli­tique, qui risque bien de faire explos­er les alliances et faire se con­fron­ter directe­ment sur le ter­rain des alliés d’hi­er, con­tre des enne­mis de demain, le Roja­va est désor­mais en danger.

La France, par la voix de son Pre­mier Min­istre, s’est « inquiétée de la destruc­tion des forces et logis­tique de ce qu’il a appelé les forces syri­ennes libres ». Il n’a pas explicite­ment cité les forces kurdes.

La sit­u­a­tion peut pro­gress­er très vite, et apporter là encore son lot de morts, de réfugiés, et de revire­ments en Syrie. On perçoit très mal pour l’in­stant où se situe le réel com­bat de front con­tre Daech.

Il faut espér­er que les rac­cour­cis et l’en­cen­soir sec­oué en per­ma­nence autour de l’in­ter­ven­tion russe vont enfin cess­er et per­me­t­tre de ne plus apporter de con­fu­sions sur la suite qui peut s’avér­er plus dramatique.

Les ques­tions dans la région ne sont pas que mil­i­taires. Elles con­cer­nent des Peu­ples, et pas seule­ment des intérêts géos­tratégiques, et au pre­mier chef, la défense du proces­sus d’au­tonomie du Roja­va, d’ailleurs exem­ple et solu­tion poli­tique pour la Syrie et sa mosaïque de Peu­ples et minorités, comme en Turquie.

Dernière ironie enfin… Les pre­miers rafales français livrés à l’Ara­bie Saou­dite pour­raient bien servir dans ce qui serait une réelle bifur­ca­tion de la guerre syri­enne. Et l’Otan dans tout ça ?

A suiv­re…

syrie carte

Petite comparaison d’informations de différentes sources  sur les débuts d’intervention en cours:

Les dirigeants du PYG que Diken a pu join­dre con­fir­ment les attaques avec des obus ciblants l’aéroport de Menagh qu’ils ont repris à Al Nos­tra il y a deux jours.

Selon Reuters, les sources du gou­verne­ment turc con­fir­ment que l’armée turque bom­barde les cibles kur­des près d’Azaz.

En effet, les autorités de l’armée turque annon­cent qu’ils bom­bar­dent les YPG, en pré­cisant que l’armée syri­enne et les YPG ont tiré au canon vers la Turquie, donc l’armée a répon­du en repré­sailles “dans le cadre de l’engagement”.

DHA informe en se bas­ant sur les annonces de l’armée turque, que les mem­bres du PYD ont ouvert le feu sur la zone de Akçabağlar, donc que l’armée a répondu.

Les mêmes autorité mil­i­taires avan­cent la thèse que les élé­ments du régime syrien tirent au morti­er dans la zone de Çalıboğazı à Hatay, tou­jours en soulig­nant que les mis­siles sont tirés “dans le cadre de l’engagement”.

Le Pre­mier Min­istre Ahmet Davu­toğlu avait déclaré le 10 février :

« Dans le cas où il y aurait une men­ace envers la Turquie, comme nous avions pris des pré­cau­tions en Irak con­tre Kandil, nous les pren­drons aus­si en Syrie. »

A son tour, John Kir­by, le porte parole du Min­istère des affaires étrangères des Etat-Unis, avait déclaré que son pays ne con­sid­érait pas les YPG comme des ter­ror­istes mais leurs meilleurs alliés.

Mais, cela n’a pas empêché les mêmes de dire hier : « Nous avons pressé les Kur­des syriens et d’autres forces affil­iées au PYD de ne pas “prof­iter” de la con­fu­sion en s’emparant de nou­veaux ter­ri­toires. Nous avons aus­si vu des infor­ma­tions con­cer­nant des tirs d’artillerie depuis le côté turc de la fron­tière et avons exhorté la Turquie à cess­er ces tirs ».

Sur ce le Prési­dent Tayyip Erdoğan en colère, avait réa­gi lors de ses ren­con­tres avec les « muhtar » (pré­posés de village) :

« Ôooo les Etats-Unis, vous êtes avec nous, ou vous êtes avec cette organ­i­sa­tion ter­ror­iste PYD et YPG ? oo les Etats-Unis, vous ne pou­vez pas nous décrire ni le PYD, ni le PKK, ni le YPG. »

« Nous con­nais­sons qui est Daech et qui est le PYD. C’est parce que vous n’arrivez pas à les recon­naitre que la région est en sang»

Le vice-Pre­mier min­istre turc Yal­cin Akdo­gan a expliqué que la pro­gres­sion des YPG à l’ouest de l’Euphrate en Syrie con­sti­tu­ait « une ligne rouge ». « Il s’agit de ques­tions qui touchent à la sécu­rité nationale de la Turquie. La Turquie n’est pas une nation qui va regarder ce qui se passe les bras croisés », a‑t-il déclaré à une chaîne télé.

Plus tôt dans la journée de same­di, le Pre­mier min­istre turc Ahmet Davu­to­glu a men­acé de lancer une action mil­i­taire au sol en Syrie con­tre le PYD, “organ­i­sa­tion terroriste”.

Il a  égale­ment  déclaré : «Nous pou­vons si besoin pren­dre en Syrie les mêmes mesures qu’en Irak et à Qandil», lors d’un dis­cours télévisé pronon­cé à Erz­in­can (est), en référence aux bom­barde­ments opérés en 2015 con­tre le Par­ti des tra­vailleurs kur­des dans cette mon­tagne du nord de l’I­rak . «Nous atten­dri­ons de nos amis et alliés qu’ils nous sou­ti­en­nent», a‑t-il ajouté.

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