Les autorités turques tentent de maquiller les crimes de guerre à Cizre. (Cizîr en langue kurde).
Après que la télévision d’Etat ait créé un choc par l’annonce de 60 morts, et que les forces armées aient diffusé des images de corps calcinés avec des commentaires de « victoire » sur les réseaux sociaux, les mêmes médias commencent à diffuser des chiffres fantaisistes, tandis que sur place, on fait disparaître des corps, quitte à les ressortir plus tard pour justifier de nouvelles « victoires ».
Il s’agit d’une communication pour diminuer l’impact que ce massacre de Cizîr a eu, principalement à l’extérieur de la Turquie, et pour préparer l’opinion publique à d’autres « exécutions » dans les prochains jours à Cizîr ou environs.
La thèse officielle devient celle de la « destruction » d’un centre de commandement du PKK. On sait parfaitement que des combattants pouvaient être présents, réfugiés dans les immeubles, d’autres civils blessés en grand nombre, dont certains depuis longtemps, figurent pourtant parmi les victimes. Peu importe la nature militaire ou civile des victimes, il s’agit d’un massacre, d’une action terroriste de l’Etat, justifiable de plainte pour “crimes de guerre” délibérés.
La confusion est volontairement entretenue sur les chiffres, les identités, les circonstances, afin de préparer la manipulation de preuves, en cas d’enquête internationale. Davutoglu ne qualifie-t-il pas publiquement ce massacre “d’opération réussie” devant des responsables internationaux ?
Des questions se posent également sur l’origine des « incendies », et surtout les blessés, morts ensuite, qui ont d’abord été brûlé, comme si des obus ou des grenades au phosphore avaient été utilisés par les forces de répression.
L’état de siège et les troupes en faction empêche toute enquête indépendante, et surtout toute approche, tant à l’hôpital, que pour connaître la destination de corps non comptabilisés.
Un parlementaire du HDP sur place, diffuse quelques informations à partir de son compte tweeter, qui permettent de se préparer à cette manipulation médiatique en cours.
Publiés ce soir (8 février) à 21h00 sur le compte Twitter du député HDP Faysal Sarıyıldız.
1- Nous ne croyons absolument pas que l’information communiquée par la TRT Info, « 60 terroristes on été tués » à Cizre, ait été servie à l’insu du gouvernement.
2- Ils ont créé consciemment, un état de choc sur l’opinion publique sensible et sur le peuple kurde avec le nombre 60. [pour] Ensuite tirer ce nombre à 10 afin de rendre les morts ordinaires.
3- Lors de la communication que nous avons eu avec les personnes se trouvant dans la maison, ils nous a été signalé que la moitié des présents avait les visages brûlés et leur yeux ne voyaient plus.
4- Les militaires sont en ce moment dans l’immeuble dans lequel se trouvait 52 personnes et 10 corps. Si 10 personnes ont été tuées, et si le reste n’est ni dans les hôpitaux ou au commissariat, où sont ils ?
5- En se basant sur quelles sources les Infos du TRT, chaine nationale liée au Premier Ministre, a servi l’information « 60 terroristes ont été tués » ? Pourquoi la Préfecture de Şırnak n’a pas démenti tout de suite cette information ?
6- Ils vont annoncer la mort de ces dizaines de personnes massacrées, partie par partie, avec des mises en scène d’affrontements. En ce moment même, on entend des intenses bruits de tirs dans l’immeuble et ses alentours.
7- Nous craignons qu’ils dispersent des dizaines de corps dans des lieux différents avec des fictions d’affrontements. Il faut que notre peuple sache cela.
8- Si ce n’était pas le cas, pourquoi alors, les voitures corbillards qui sont allées jusqu’à la porte de l’immeuble où les militaires se sont appropriés des corps aujourd’hui ?
9- Nous n’avons pas d’informations sur le nombre de ceux qui ont perdu la vie. Mais il y a deux réalités que nous savons, sur lesquelles nous n’avons aucun doute
10- C’est la réalité à cent pour cent, qu’un massacre a été commis à Cizre et la réalité que bien plus de personnes que le nombre 10 annoncé par la Préfecture de Şırnak, ont été exécutées.
Questionnements qui ne sont pas ceux des médias turcs inféodés, qui donnent des versions officielles, qui, soyons en sûr, par suivisme ou paresse de rédactions qui n’avaient plus de journalistes présents sur place, des médias reprendront ici dans les jours à venir.
Entre la volonté affichée « d’en finir » du gouvernement AKP, pressé de répondre à ce qui se déroule à la frontière syrienne, et de profiter d’une possible avancée militaire pour lui, et les ultra nationalistes qui le soutiennent, pressés eux de fêter leur « victoire politique », en diffusant des images morbides, il y a la nécessité d’éviter qu’une commission quelconque de l’ONU ne fourre son nez dans les pratiques de « nettoyage » au Kurdistan Nord.
A cet égard, disposer de médias aux ordres est un atout pour Erdogan, qui va chercher à manipuler la tétanie des populations à l’Ouest et dans les métropoles. Disposer aussi de soutiens politiques, qui par exemple, envoient leurs polices contre les manifestations de colère qui se sont exprimées dans différentes capitales européennes, est un deuxième atout.
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La seule force actuellement dont on peut disposer, c’est celle de la contre information systématique à grande échelle à partir de sources fiables. Inutile de manipuler les images ou les faits, comme le font à l’envie les médias officiels turcs, repris par d’autres en Europe. La réalité de ces crimes de guerre a en elle même assez de force pour être entendue.
Ce sont la diffusion incessante de cette contre information, les manifestations sous toutes formes, les adresses en direction des politiciens, le tapage et l’expression légitime de la colère, qui fissureront le mur de silence.
Ajout du 10 février : D’autres personnes (le chiffre de 25 est donné) ont été brûlées vives dans un autre immeuble au lendemain de ce massacre. Des corps ont été également recueillis par des habitants dans les rues. Dans le même temps, les mercenaires font circuler des photos de corps suppliciés sur les réseaux sociaux, dont des photos de femmes… Nous n’avons pas le coeur à faire un billet supplémentaire pour abonder cet inventaires des horreurs.
Nous reprendrons simplement les dernières paroles fortes d’une victime (au téléphone), alors que tout brûlait autour de lui : “Que ceux qui ont gardé le silence ne viennent pas ensuite pleurer sur nos tombes”.