Le district de Beyoğlu à Istanbul a abrité de nombreux édifices historiques pendant des décennies. De beaux restes d’architecture.
Non seulement les passants, dans le train train quotidien lèvent rarement leurs regards vers les hauteurs pour découvrir ces beautés, mais aussi ces richesses historiques et architecturales sont petit à petit pillées en prétextant des projets pour le profit, sous couvert d’initiatives de réhabilitation, surtout dans ces dernières années.
Nous avions consacré un article sur Emek, le cinéma historique et légendaire d’Istanbul qui a fini en décor à effet carton pâte dans un centre commercial… Juste un exemple parmi d’autres. La Turquie est parsemée d’un bout à l’autre de “chefs d’oeuvre” de restauration qui donneraient des boutons de fièvre à n’importe quel commun des mortels qui a une once de sens d’esthétisme et du respect pour le beau et l’histoire.
En février 2014 un article publié sur le site Kültür Istanbul, tirait les sonnettes d’alarmes sur l’avenir incertain de Narmanlı Han.
Voilà ce que nous apprenions dans cet article.
En 19ème, Beyoğlu a connu dans l’histoire deux grands incendies qui ont dévasté le quartier, en 1831 et en 1870. La plupart des édifices qualifiés des « plus anciennes » sont majoritairement construites après 1870. Narmanlı Han est une des rares richesses qui a pu traverser ces moments dévastateurs.
Cet édifice avait été commandé par les Russes comme local d’ambassade en 1831 et avait été construit par Guiseppe Fossatti, architecte restaurateur notamment de Sainte-Sophie.
Narmanlı Han après avoir servi d’ambassade, a été utilisé comme tribunal et prison. Dans les premières années de la République de Turquie, elle a été l’auberge des compagnies de tourisme et touristes russes blancs. En 1933, l’immeuble a été vendu aux frères Avni et Sıtkı Narmalı qui l’ont ensuite loué à des artistes. Bedri Rami Eyüboğlu, Alite Berger, Ahmet Hamdi Tanpınar, Firsek Karol sont des artistes connus qui ont fait partie des locataires. Les artistes du « Groupe D » avaient ouvert leur première exposition de peinture dans la « Maison du chapeaux Mimoza » qui se trouvait à Narmanlı Han.
En arrivant dans les années 1990, à Narmanlı Han, il ne restait plus que le journal le plus ancien du pays, « Jamanak », le gardien attitré de l’édifice Oncle Raşit , le bouquiniste, et le disquaire Deniz Pınar, le vendeur de thé Ali, l’atelier du sculpteur Namık Denizhan, le réparateur de tapis fait main, un bureau notarial, des dizaines de chats et madame Meral qui les nourrissait, une foule de merles, des acacias indomptables, des glycines abondantes, et des dizaines de personnes proches de l’expulsion….
Les héritiers étaient très pressés d’expulser tout ce petit monde, et ils ont réussi. En 2001, le groupe Yapı Kredi Koray a racheté le lieu. l’Architecte Korhan Gümüş et la chambre des architectes se sont pourtant battus et la décision de travaux a été arrêtée.
En 2014, Narmanlı Han vidé de ses âmes était devenu un lieu sans vie… Il ne restait plus que le fils de gardien Oncle Raşit qui attendait toujours au fond de la cour intérieure.
Faisons un tour vers le « Passage des français » qui, appartenant lui aussi à la famille Narmanlı a été également vendu. Une demande de restauration été déposée en 1982. Après une attente de 10 ans, les travaux ont commencé et l’édifice a été ouvert avec l’enseigne « Karaköy Electronic Center ».
Cet article publié sur Kültür Istanbul en 2014, se terminait sur une note d’espoir : “Espérons que le sort de Narmanlı Han ne sera pas le même que le Passage des français.”
Nous apprenons aujourd’hui que les travaux de Narmanlı Han seront fait par le même architecte que le Passage des français. Il va falloir s’attendre donc au pire…
Nous vous laissons apprécier le massacre :
C’est joli comme ça… C’est coquet, c’est propre… un peu standard européen sans identité
Et… ? Levons donc un peu les yeux…
Un modèle architectural dans le style “porte containers”… ça fait voyager