Le 13 janvier autour de 23h45, a vu mourir trois enfants. Le quartier général de la gendarmerie de Çınar, commune de Diyarbakır a été la cible d’une attaque à l’arme automatique. Un autre groupe a pris pour cible la Direction de la Sécurité de la commune, avec un véhicule chargé d’explosifs, un lance roquettes et des armes automatiques.
Le bâtiment de la Direction de la Sécurité a été lourdement endommagé, une maison de 2 étages attenante au bâtiment s’est effondrée. Les attaques ont fait 6 morts, dont un policier, et trois enfants de 12, 3 et 1 an. 43 personnes dont 6 policiers et 8 proches de policiers ont été blessées.
Les affrontements qui ont suivi l’explosion, ont duré 40 minutes. Les assaillants se sont ensuite dispersés.
La police a déclaré que “8 terroristes du PKK avaient été tués” lors des opérations effectuées ensuite, après mise du quartier sous blocus.
Les bureaux du parti BDP (Parti des régions démocrates) a été incendié par des inconnus (par les assaillants en fuite, selon la police).
Selahattin Demirtaş, leader du HDP, en soutien aujourd’hui du personnel médical qui faisait un sit-in afin de dénoncer le fait qu’ils étaient systématiquement empêchés de soigner les blessés des affrontements qui se sont déroulés pendant le couvre-feu à Sur, commune de Diyarbakır, a parlé à cette occasion de cette attaque de Çınar.
« Défendre la paix avec courage, c’ est aussi commémorer ceux que nous avons perdu à Çınar, avec la même chaleur humaine que ceux qui sont morts à Sur, Silvan, Cizre… Pouvons-nous différencier un bébé tué à Çınar d’un autre tué à Sur ? Nous ne le pouvons pas. Et ceux qui arrivent à faire cela, ne peuvent pas se dire je suis un être humain. »
« Le peuple attend que ceux qui ont commis ces crimes aussi bien à Çınar qu’à Cizre, à Silopi, Sur, Silvan et ailleurs, qui qu’ils soient, demandent des excuses au peuple. »
« Et pour que les bébés ne meurent plus, tout le monde doit hausser la voix ».
La presse pro Erdoğan s’est bien sûr déchaînée, avec de grands titres sur “les bébés tués par le PKK”, “les attentats du PKK”, elle qui a l’habitude de titrer à chaque mort dans la région de Diyarbakır “ils l’ont bien cherché ces terroristes”.
Des enfants continueront à mourir, tant que cette guerre sera alimentée.
Erdoğan et ses soutiens ultra nationalistes se déchaînent aujourd’hui contre les intellectuels défenseurs de la paix. Il a fait hier un procès en “sécessionnisme” à ceux qui proposent les négociations et la paix pour parvenir, dans le cadre d’une réforme constitutionnelle, à établir des conditions du vivre ensemble pour la Turquie toute entière.
Des enfants continueront à mourir, tant qu’une jeunesse qui a vu la mort rôder, ou entendu les récits des membres de sa famille, de ses proches, de ses amis parlant de ceux qui ont disparu sous les coups de la répression, ne sera pas tournée vers un avenir de paix, un projet de vie, rendu crédible par un retour de la paix civile.
Des enfants continueront à mourir tant que le gouvernement AKP mènera cette guerre comme une composante des autres en Syrie, contre le Rojava, en Irak, contre la résistance kurde…
Des enfants continueront à mourir tant que tous les intérêts des puissances régionales à la guerre seront soutenus par plus grandes qu’elles encore, donnant naissance au passage des créatures immondes comme Daech, et confortant les “pouvoirs forts” contre les Peuples.
La guerre est une saloperie qui ne peut légitimer la mort d’un enfant, mais pas davantage celle d’un jeune homme traîné derrière un blindé jusqu’à ne plus avoir de visage, sous les injures de la soldatesque. Et que dire des enfants tués avec leur mère enceinte, dans les quartiers assiégés ?
Chacun sait que le règlement ne peut être que politique, et la majorité des populations kurdes aspirent à la paix et à une vie commune. Mais personne ne peut leur demander de montrer l’emplacement de leur coeur, sans se défendre, face à des assassins armés.
Des enfants continueront à mourir dans cette guerre, comme sur des plages, tant que l’Europe proche chérira sa finance et son confort, en déléguant ses guerres à d’autres, après avoir érigé ses murs.
Personne n’avait jusqu’à hier revendiqué l’attaque officiellement. Les Forces de défense du HPG-BIM viennent de le faire par communiqué. “L’action visait les forces de sécurité, et l’attention a été portée pour éviter les dommages civils. Pourtant, l’action a entraîné la mort de civils, pour lequel nous exprimons notre tristesse et nos condoléances aux familles “. Ils déclarent aussi que “le HPG a mené une action en représailles de l’exécution sauvage de 12 combattants par l’Etat turc à Van le 10 Janvier. Cette action a tué 30 policiers, et blessé quelques autres”.
Les forces de répression de gendarmerie qui ont ensuite abattu 8 personnes n’ont pas démontré qu’elles avaient un lien direct avec l’explosion non plus.
On ne peut pourtant faire passer ce fait de guerre comme un haut “fait d’armes”. Tout juste une action de “représailles” qui en appellera d’autres, et n’assure en rien la protection ou l’autodéfense réelle des populations.
Des dizaines de victimes, morts ou blessés, ce 13 janvier 2016, qui n’auraient jamais existé si, il y a plus de six mois maintenant, Erdoğan n’avait pas rompu unilatéralement les négociations et le cessez le feu, pour des raisons d’équilibre interne de pouvoir, plongeant la Turquie dans la guerre à nouveau à l’Est.
« Et pour que les bébés ne meurent plus, tout le monde doit hausser la voix »