carte-adiyamanUne com­mis­sion d’enquête de CHP (Par­ti démoc­rate kémal­iste) s’est ren­due récem­ment faire des obser­va­tions à Adıya­man, ville du sud-Est de Turquie, qui a la répu­ta­tion d’être un lieu d’organisation et de recrute­ment pour Daesh.

La com­mis­sion vient de ren­dre pub­lic son rap­port d’observation.

Points de communication de Daesh

Cer­tains cafés sont devenus des points de com­mu­ni­ca­tion et de recrute­ment pour Daesh. L’organisation utilise égale­ment cer­taines mosquées de la ville pour enrôler des jeunes. Par­ti­c­ulière­ment à la mosquée de Maraşlılar et Fatih, des per­son­nes extérieures au per­son­nel organ­isent des ren­con­tres et débats et font des appels au dji­had. Les imams employés de ces mosquées fer­ment les yeux sur ces activ­ités. Une famille qui s’est plaint de la sit­u­a­tion affirme a avoir essuyé un fin de non recevoir « Ne vous mêlez pas à ça, ils sont venus de l’extérieur, c’est l’Etat qui les a envoyés. Ils par­tiront bientôt ».

Les enfants font pression sur leurs parents

La com­mis­sion rap­porte que des jeunes et enfants font pres­sion sur leurs mères pour qu’elles por­tent le burqa, et dis­ent à leur père qu’il ne faut pas faire la prière der­rière l’imam de l’Etat et les appel­lent à se res­saisir : « Votre chemin n’est pas le chemin d’Allah, revenez sur le droit chemin. »

Passage de la frontière : 20 livres turques

Un autre point impor­tant con­cerne les allers et retours des jeunes qui passent en Syrie. En effet, il revi­en­nent un moment à Adıya­man et retour­nent de nou­veau en Syrie. Mal­gré leurs aller-retours réguliers, aucune enquête n’a été faite à ce jour par les forces de sécu­rité. Cer­tains enfants ont affir­mé à leur famille qu’ils payent un bakchich de 20 livres turques (6,5 €) pour pass­er la fron­tière. Les témoins racon­tent que des ambu­lances trans­fèrent des blessés de Daesh depuis la Syrie, ne retour­nent pas à vide et trans­portent les jeunes, au retour.

Les forces de sécurité ne donnent pas suite aux dénonciations

Les familles des jeunes qui ont quit­té la mai­son et qui font des aller-retours en Syrie ont à plusieurs repris­es prévenu les forces de la Sécurité.

La famille d’Orhan Gön­der, prin­ci­pal sus­pect de l’attentat à la bombe de Diyarbakır, avait égale­ment dénon­cé leur fils 6 mois avant qu’il quitte la mai­son, 1 an avant l’attentat. Les familles affir­ment que les forces de la Sécu­rité répon­dent « s’ils n’ont pas com­mis de dél­its nous ne pou­vons riens faire. »

Les alévis font la garde de crainte de Daesh

Le deux­ième volet du rap­port con­cerne les entre­tiens qui se sont tenus avec des organ­i­sa­tions de société civile, les lead­ers Alévis, les directeurs de “cemevi” (maisons de culte des alévis). Ces per­son­nes affir­ment que les recrute­ments sont fait dans la ville au vue de tous, et que mal­gré cela aucune pré­cau­tion n’est prise et que rien n’est fait pour faire cess­er cela. Les directeurs de cemevi, soulig­nent que dans leurs lieux de culte la fréquen­ta­tion a dimin­ué par crainte, et que les habi­tants n’osent plus par­ticiper aux céré­monies de mariages. Ils affir­ment que dans cer­tains vil­lages, les habi­tants mon­tent la garde de nuit.

Aucun membre de Daesh n’a été arrêté

Ali Ulvi Yıl­maz, le Pro­cureur de République d’Adıyaman a déclaré lors de sa ren­con­tre avec la com­mis­sion, qu’actuellement aucun mem­bre de Daesh n’a été encore arrêté. Un ordre d’arrêt a seule­ment été for­mulé pour 15 per­son­nes, et 40 sont sous sim­ple con­trôle judi­ci­aire. Une enquête est en cours, en phase de recherche de preuves. Il a ajouté que Orhan Gön­der le kamikaze de Diyarbakır est con­sid­éré par les ser­vices d’Adıyaman comme “dis­paru”.

La liberté de circulation

La com­mis­sion a égale­ment ren­con­tré le sous-Directeur des forces de sécu­rité d’Adıyaman. Le sous-Directeur a répon­du à la ques­tion « Y‑a-t-il un suivi ciblant ces per­son­nes recon­nues comme revenant de la guerre, de Syrie ? » :
« Nous ne sommes pas habil­ités à faire ce genre d’interventions car il existe une lib­erté de circulation. »

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Le rap­port ne fait que de con­firmer les témoignages des habi­tants, des jour­nal­istes et les arti­cles qui parais­sent dans les jour­naux turcs depuis quelques mois. En juil­let, les respon­s­ables de l’As­so­ci­a­tions des Droits de l’Homme tiraient déjà la son­nette d’alarme en faisant les mêmes con­stats. Ils pointaient égale­ment le chô­mage crois­sant, la mis­ère finan­cière des familles facil­i­tant la tâche de Daesh qui choi­sis­sait plutôt les jeunes dans des con­di­tions dif­fi­ciles et sans vrais pro­jets d’avenir.

Dans le cli­mat de répres­sion et de vio­lence con­tre des pop­u­la­tions civiles, sous le pré­texte d’an­ti ter­ror­isme, on peut con­stater que la “lib­erté de cir­cu­la­tion” et les autres “lib­ertés” en général, sont dans l’op­tique de la police, à géométrie très vari­able. La cor­rup­tion s’a­joutant à la mis­ère sociale, Daesh a de beaux jours devant lui.

Il n’y a donc pas que le pét­role et les armes qui fran­chissent les fron­tières et nour­ris­sent cor­rup­tion et trafics, et rem­plis­sent par­fois des “boîtes à chaus­sures”  jusqu’au plus haut de l’état. 

On voit que Daesh recrute sur le sol même de la Turquie au grand jour.

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