Aujourd’hui 29 mai 2015, le Tribunal Constitutionnel Suprême turc (AYM) a supprimé la loi qui condamnait les couples qui s’unissaient par un mariage religieux avant le mariage officiel, à une peine de prison de 2 à 6 mois de prison.
Cet alinéa faisait partie de l’article n°230 du Code Pénal intitulé « Polygamie, mariage blanc, cérémonie religieuse ». La suppression a été accepté par 12 votes contre 4.
La demande était motivée par les arguments suivants : La loi va à l’encontre de l’article 10 de la Constitution, qui précise que les personnes sont égales, devant le Droit, quelque soit sa langue, sa couleur, son genre, ses convictions politiques et philosophiques, sa religion. Les partisans de la suppression ont exprimé que cette loi était contre le principe de la protection de la vie privée, de la religion et de la liberté de conscience. Ceux qui souhaitaient maintenir la pénalisation, ont défendu leur vision, en précisant que cette décision encouragerait le mariage religieux qui devient par le fait une alternative au mariage officiel. Ils ont également souligné que cette loi n’est pas anticonstitutionnelle car l’article n°41 de la Constitution donne le devoir de protection des mères et des enfants à l’Etat et l’interdiction de mariage religieux avant le mariage officiel fait partie des éléments qui évite le désordre social.
Cette demande avait été déjà faite en 1999 et elle avait été refusée.
Les organisations de la société civile, les collectifs féministes tirent la sonnette d’alarme. Dans un couple réuni seul par le mariage religieux, sans aucun enregistrement officiel, l’homme sera encouragé de quitter sa femme et ses enfants sans être inquiété d’un dédommagement, ni d’une pension. Dans l’Islam l’homme peut “divorcer” de sa compagne, épousée par un mariage religieux en prononçant 3 fois “je te divorce”.
Hülya Gülbahar, avocate, (du groupe de femmes Eşitiz) se pose une question : « Voulons-nous d’une société composée d’ hommes polygames ? » et ajoute qu’avec ce changement de nombreuses personnes préfèreront le mariage religieux et ne se marieront pas officiellement. Par conséquent, les problèmes juridiques sur l’affiliation des enfants et l’attribution de pensions alimentaires augmenteront, et ce au détriment aussi bien des enfants que des femmes.
L’Avocate, Filiz Kerestecioğlu, (du Kahudev) exprime son inquiétude. Elle pense que dans un pays de liberté, d’égalité entre homme et femme, le mariage officiel ne porterait pas autant de responsabilité et chacun ferait comme il veut. Il y a bien des couples qui souhaitent vivre et qui vivent sans être mariés. Or en Turquie il faut mener une bataille sur divers plans. La femme n’est pas encore tout à fait sécurisée par le Droit, même en étant mariée officiellement. L’égalité de partage des biens communs par les deux époux, a été obtenu après des batailles acbarnées, seulement en 2002.
En Turquie l’age minimum de mariage est 18 ans. Nebahat Akkoç, (fondatrice du Kamer), insiste sur ce sujet. Pour l’instant la limite d’age, s’il y en a, n’a pas été déclarée. Si cette limite ne figure pas dans la nouvelle présentation de loi, ce changement ouvrira un boulevard devant les mariages d’enfants.