Ma soeur m’a montré deux images sur Facebook. Il parait qu’ils ont carrément planté un panneau dans le campus de l’Université Technique d’Istanbul.
Dans le campus, il est STRICTEMENT INTERDIT :
1- de balader les chiens.
2- de laisser des aliments par terre.
3- de mettre des abris pour des animaux.
SVP ne causez pas de pollution de l’environnement.
Rectorat de la faculté de Gestion de l’Université Technique d’Istanbul.
Et la deuxième image, c’est un document. Un procès verbal établi contre un employé de cantine de l’Université. Ca paye d’avoir un grand coeur.
Procès verbal du 18 décembre 2014
Il a été observé auparavant, plusieurs fois, que Ihsan Zavar, employé du restaurant universitaire de Taşkışla de L’Université Technique d’Istanbul, donnait à manger aux chats et il a été averti. Malgré les avertissement ultérieurs à l’attention du personnel, Ihsan Zavar a été vu encore une fois, le 17 décembre 2014, en train de nourrir les chats. Vous êtes informés que ce procès verbal étant établi en guise d’avertissement, en cas de continuité, les démarches seront entamées.
Signatures : Ihsan Zavar, Employé — Ibrahim Özkan, Responsable administratif — Hakan Yaşar, Technicien d’alimentation
Ben oui, les gens nourrissent les animaux des rues. Que voulez-vous faire, quand vous voyez ces pauvres bêtes affamées ? Ce qui n’est pas normal c’est qu’ils soient condamnées de vivre à la ville. Ils n’ont rien demandé eux. Ils sont juste là. Il faut peut être les laisser mourir ? Ca ne va pas la tête ?!
Un projet de loi traîne depuis le printemps dernier. Il y a de ces aberrations là dedans ! Les associations protectrices des droits des animaux se battent contre ce projet de loi qu’ils appellent “la loi ensanglantée”, parce qu’elle est faite pour faire disparaitre les animaux des rues, grossir ainsi les bénéfices de ceux qui exploitent les animaux.
Ils ont fait des manifs, se sont mobilisées pour informer et sensibiliser les gens. Si j’ai bien compris, avec cette loi, les animaux des rues peuvent être mis dans des refuges pour être vendus. Ca veut dire que sans aucun contrôle ni traçabilité, les pauvres bêtes peuvent être bazardées à n’importe quel secteur de mauvaise foi, commercial ou laboratoire… Le commerce va prendre le pas sur l’adoption : “Ben quoi ? Ils ne sont pas adoptés alors on les a vendus !”.
Un point du projet reste flou. Rien ne dit que les laboratoires ne pourront pas puiser dans ce “stock” pour acheter ou faire acheter des animaux, détournant ainsi l’interdiction faite d’expérimenter sur les animaux des rues.
Je passe d’autres questions comme celles des refuges. Plusieurs constructions de refuges en cours, très loin des habitations, des lieux qui ressemblent à des camps de concentration à grosse capacité, où on peut “stocker” des milliers d’animaux.
Le projet interdit la vente des animaux, autres que les poissons et oiseaux dans les animaleries, et par conséquent met les élevages en avant.
Les portes-paroles de la Commission d’Environnement soulignent que cela n’empêcherait pas le commerce à grande échelle des animaux “sans propriétaires” et en même temps transformerait les animaux d’élevage encore plus en “marchandises — produits en série”.
Il n’y a aucun remède non plus dans ce projet de loi pour régler les problèmes des zoos, des cirques, des animaux de traits, de combats, de fourrure, etc.
Je vois d’un très mauvais oeil, le fait qu’aucune ligne de la Loi de la Protection Animale existante ne soit reprise dans ce projet. Pas une ligne.
Ce projet n’est toujours pas passé, mais si ça passe, ce sera la cata.
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Après tout ce que je vous raconte, vous allez être surpris, si je vous dis que je n’ai pas d’animaux à la maison.
Je rêve d’un chat mais je ne peux pas me permettre d’en prendre un. Parce qu’adopter un animal pour moi, est quelque chose à ne pas prendre à la légère. C’est une responsabilité et cela nécessite certaines conditions.
Mais non, je n’ai pas peur des griffes sur le canapé, je ne suis pas allergique non plus. C’est vrai que l’idée de porter des choses lourdes ‑gros sacs de croquettes, de litière- me fait drôlement peur, mais là n’est pas le problème. C’est plus trivial que ça : c’est pas l’amour qui me manque, mais les moyens. Alimentation, litière, vaccins, vermifuge, anti puces….
C’est con à dire mais pour moi une boule d’amour poilue devient du “luxe”.
Vous voyez, il a fallu que je me passe d’une autre amie définitivement il y a quelques années : j’ai arrêté de fumer. Je vous entends dire : “c’est une bonne chose”. Oui, c’est vrai. Mais c’est un peu rageant quand on le fait à 75 ans, à contre coeur, juste parce que les moyens ne permettent plus d’entretenir cette amitié…. C’est pareil pour avoir un nouvel ami félin… contre coeur, petit budget.
Pourtant j’en croise plein devant chez moi. Mon immeuble se trouve dans un quartier où il y a encore des arbres. Beaucoup de chats vivent dans ce petit monde. Ils y sont plutôt à leur aise. Beaucoup d’habitants, comme moi, les nourrissent régulièrement. Les chats de mon quartier sont plutôt chanceux, ils se prélassent sur l’herbe, sur les murs, dorment dans de petits abris, se réchauffent sur les capots de voitures, allongés comme de vraies stars.
Chaque fois que je croise les yeux d’une de ces beautés, mon coeur lutte avec ma raison. Je me donne des coups de pieds aux fesses pour m’éloigner. L’autre jour au marché j’ai trouvé une couverture imprimée de cinq gros chats magnifiques. Le motif était un peu mal placé, c’est sans doute pour ce défaut que cette couverture s’était retrouvée sur un étal de soldes à 3 livres turques. Alors je l’ai achetée, sous les yeux grands ouverts de mes deux soeurs. Elles se sont moquées de moi parce que j’achetais un truc de “gamine”. Elles ne comprennent rien.
Comme ça j’ai l’impression d’avoir cinq chats à la maison. J’ai mis la couverture sur mon canapé. Je m’assois en face et je les regarde, je les admire. Je sais que vous ne direz rien à personne, si je vous avoue que je leur parle parfois…. Je les appelle “mes chats photocopies”. Je n’arrive jamais à décider lequel d’entre eux j’aime le plus. Ils sont tous beaux.
Tous les chats sont beaux, même maigrichons, même sales, même balafrés, même photocopiés.
Les chats d’Istanbul :
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Merci à la Page Facebook de l’Association des chats Angora (Ankara Kedisi Derneği) et à toutes et tous les photographes pour ces belles images.
Photo à la une : Aynur Balkancı (Bosphore)