Kader Ortakaya, une étudiante kurde de 28 ans qui participait à une chaîne humaine à la frontière, a été abattue aujourd’hui par les militaires turques. La manifestation organisée par un collectif d’artistes a été dispersée à l’aide de gaz lacrymogènes et de tirs à balles réelles. Elle est décédée d’une balle en pleine tête. L’armée turque a également gazé et tiré sur les civils du côté de Kobané.
A noter que depuis 25 jours, elle veillait à la frontière afin d’empêcher les membres de DAESH de passer et d’augmenter les rangs des combattants islamiques. Elle a aussi pris part aux travaux de l’académie des femmes d’Amed et avait participé aux évènements du parc Gezi. Une source près des combats nous apprend qu’elle tentait de passer la frontière afin de rejoindre la ville de Kobané, en soutien aux milices qui se battent actuellement sur la zone. L’armée turque n’a pas immédiatement commenté cet incident.
Dans une interview donnée à Sterk TV le jour précédent l’incident, Kader Ortakaya déclarait ” Nous allons nous battre jusqu’à la dernière goutte de notre sang, jusqu’à ce qu’à l’endroit où les graines de la liberté ont été semées, et là où ils attaquent, soit libéré”
Elle a aussi laissé un courrier à ses proches, qui ne leur est malheureusement parvenu qu’après le décès de la jeune femme. En voici quelques extraits :
“Ma chère famille,
Je suis à Kobané. Cette guerre n’est pas seulement la guerre des habitants de Kobané, c’est notre guerre à tous. Je rejoins le combat pour vous, ma famille et pour l’humanité toute entière. Si nous ne voyons pas cette guerre comme la nôtre aujourd’hui, alors nous serons seuls lorsque les bombes toucheront nos maisons demain. Gagner cette guerre, cela veut dire que les pauvres et les oppressés gagnent. Je pense être plus utile en rejoignant le combat plutôt qu’en travaillant dans un bureau. Vous serez probablement fâchés contre moi, car je vous au rendus tristes, mais un jour ou l’autre vous comprendrez ma décision.
J’aimerais que tous puissent vivre librement et égaux. J’aimerais que personne ne soit exploité toute sa vie pour trouver un morceau de pain ou un abri. Pour que ces rêves deviennent réalité, il faut se battre.
[…]
Si vous ne voulez pas me voir torturée et emprisonnée, n’allez pas voir la police ou une autre institution. Si vous le faites, mes amis et moi pourraient en souffrir. Ne parlez à personne du fait que je sois allée à Kobané, comme ça je ne serai pas jetée en prison quand je rentrerai. Déchirez cette lettre quand vous l’aurez lue.”
Depuis le début des combats à Kobané, la Turquie a accueilli 200 000 réfugiés syriens. Mais les militaires turcs postés à la frontière empêchent les kurdes non syriens de passer la frontière afin de rejoindre les combattants des différentes milices populaires. En revanche, bien que la Turquie refuse d’intervenir militairement contre l’Etat Islamique, elle a autorisé un contingent de 150 Peshmergas à traverser leur territoire afin de rejoindre Kobané.
Traduit par Meryl Ipek pour Kedistan
Source : dépêches Firat news 07 novembre 2014, et contacts sur le terrain